LE COMMERCE DE L’ALIMENTATION ET DE LA RESTAURATION ALIMENTAIRE
Quatre méthodes pour vous aider à établir vos prix de vente stratégique
LA FIXATION DES PRIX DE VENTE
Il existe plusieurs méthodes pour vous aider à établir vos prix de vente. Parmi celles-ci, certaines s’avèrent beaucoup trop difficiles à utiliser. Par contre, quelques-unes sont très utiles et assez faciles d’utilisation.
Quelle que soit la méthode que vous choisirez, il y a un préalable à respecter. Vous devez avant toute chose être en mesure de déterminer très précisément votre coût des ressources alimentaires. Pour la plupart des méthodes, il sera même nécessaire que vous soyez en mesure d’établir le total de vos coûts.
Quatre méthodes pour vous aider à établir vos prix de vente
1 — La méthode du coût unitaire majoré d’un pourcentage du prix de vente
Selon cette méthode, on utilise les coûts totaux comme base pour établir les prix de vente des différents items inscrits sur vos cartes et vos menus. Avec cette méthode, vous pourrez récupérer à long terme tous vos coûts de transformation, de communication/commercialisation, d’administration et de financement, et obtenir de surcroît un montant raisonnable de profit pour rémunérer le capital investi dans votre entreprise.
Exemple
Le propriétaire du restaurant La Belle Pizza inc. prévoit une production annuelle de 20 000 pizzas et il planifie à cet effet les coûts unitaires suivants :
- Ressources alimentaires 2,50 $
- Main d’œuvre 2,50 $
- Frais généraux 2,50 $
- Amortissement 0,50 $
- Frais financiers 0,50 $
- Coût totaux 8,50 $
Si le propriétaire juge qu’un profit avant impôt de 10 % par rapport aux « prix de vente » est tout à fait raisonnable, calculez quel sera le « prix de vente » minimum demandé pour chaque pizza ?
Si PV est = au « prix de vente » alors :
- 8,50 $ + 10 % du prix de vente = prix de vente
- 8,50 $ + 0,10 PV = PV
- 8,50 $ = PV – 0,10 PV
- 8,50 $ = 0,90 PV
- 8,50 $ / 0,90 = PV
- 9,45 $ = PV
Le prix de vente minimum suggéré pour chaque pizza est donc de 9,45 $
2 — La méthode du coût majoré du rendement désiré sur le capital investi
Le capital investi par le propriétaire dans l’entreprise La Belle Pizza inc. est de 150 000 $. Celui-ci désire obtenir un rendement sur son investissement de 16 %. Alors, au coût total unitaire de notre pizza doit s’ajouter un montant de 1,20 $ qui représente le bénéfice moyen qu’il faut obtenir par pizza vendue pour assurer un bénéfice total de 24 000 $ par année, soit 16 % de 150 000 $. Le bénéfice moyen par pizza est calculé en supposant une activité de production et de vente équivalente à la capacité pratique de l’entreprise, c’est-à-dire 20 000 pizzas par année. Si vous calculez le prix de vente minimum selon cette méthode, vous trouverez alors :
8,50 $ + ((16 % de 150 000 $) / 20 000 pizzas) = 9,70 $ par pizza
3 — La méthode du coût de nourriture « food cost »
Dans notre exemple, La Belle Pizza inc., le coût unitaire de ressources alimentaires est de 2,50 $. Si le coût de nourriture désiré (le « food cost » désiré) est de 25 %, alors le prix de vente se calculera de la façon suivante :
- 2,50 $ / 25 % = 10 $ par pizza
Selon cette approche, le prix de vente est fixé par rapport aux prix affichés chez les concurrents, la demande et l’intuition du preneur de décision. Évidemment, vous l’aurez compris, cette méthode, même si en pratique elle est souvent la plus utilisée, n’en demeure pas moins tout à fait inappropriée. Son application peut vous conduire tout droit vers la faillite, car le concurrent du coin (celui sur lequel vous avez aligné vos prix de vente) pratique peut-être une politique de prix en bas de son coût.
Il est pratiquement impossible que vous ayez la même structure de coûts que vos concurrents. Il est presque inimaginable de trouver deux restaurants qui possèdent le même coût de revient complet (c’est-à-dire les mêmes coûts de transformation, les mêmes coûts d’exploitation et, etc.). Vous ne dépensez probablement pas pour vos employés de cuisine le même montant que vos compétiteurs et surtout, vous n’avez sûrement pas les mêmes coûts de loyer, amortissement, décorations, taxes, assurances, et, etc.
Les limites de nos quatre méthodes théoriques
Les méthodes de fixation des prix de vente que nous venons de vous présenter forment un cadre théorique très précieux qui doit servir de guide pour les preneurs de décisions.
Cependant, ces modèles théoriques ont parfois des limites dans leur application pratique. Au nombre de ces limites, mentionnons les points suivants :
1. La demande demeure incertaine, et ce, quels que soient les prix exigés pour vos produits.
2. Le prix, même s’il est très important, n’est pas la seule variable que les consommateurs prennent en considération lorsqu’arrive le temps de choisir une entreprise de restauration alimentaire.
LA FIXATION DES PRIX DE VENTE STRATÉGIQUE
La fixation des prix de vente stratégique est un exercice très important qui requiert une très grande compétence de la part des décideurs.
La question clé à cette étape est celle-ci : vos prix sont-ils appropriés (accessible) pour la majorité des clients cibles avec lesquels vous avez décidé de faire des affaires ?
Si ce n’est pas le cas, vous avez un sérieux problème !
Pour obtenir un puissant flux de revenus de votre offre, vous devez trouver le bon corridor de prix stratégique à l’intérieur duquel vous devez vous positionner. C’est à cette étape que vous vous assurerez que les clients auront non seulement l’envie, mais aussi la capacité d’acheter vos produits.
Beaucoup d’entreprises de restauration alimentaire partent encore en sens inverse, c’est-à-dire que pour établir leur prix elles commencent par le coût.
Note : Plusieurs entreprises de restauration alimentaire font encore l’erreur de partir du coût payé pour les ressources alimentaires avant transformation et de multiplier ce coût par la suite par un multiplicateur (par exemple trois) pour fixer leur prix de vente. Il s’agit d’une pratique qui est devenue aujourd’hui complètement inappropriée.
Il s’avère de plus en plus vital, de nos jours, de connaître d’entrée de jeu les prix susceptibles de conquérir la majorité des acheteurs cibles. Le profilage s’avère à cet effet une compétence clé que l’on doit utiliser alors même que l’on est au stade de la conception de la proposition de valeur. C’est souvent en grande partie grâce au profilage des clients cibles que l’on réussit à déterminer les prix cibles que ceux-ci sont disposés à payer pour obtenir différents services de restauration.
Le corridor de prix
« Il faut établir un prix stratégique qui vous permet non seulement d’attirer la multitude de clients, mais aussi de les conserver. » — Kim et Mauborgne (2010, p. 146)
Kim et Mauborgne ont mis au point un outil — le corridor de prix du cœur de marché — pour aider les dirigeants à trouver les prix de vente qui sont appropriés pour leurs produits.
Le corridor de prix de masse est la largeur de bande qui renferme les groupes les plus importants d’acheteurs cibles. C’est dans ce corridor de prix stratégique qu’il s’effectue le plus de transactions dans le secteur de la restauration alimentaire.
Première étape : identifier les corridors de prix du marché qui correspondent à votre offre
Quand il s’agit d’établir leurs prix de vente, toutes les entreprises examinent préalablement les produits qui ressemblent le plus à leurs produits sur le plan de la forme, c’est-à-dire en se limitant le plus souvent à leur secteur d’activité. C’est, bien sûr, un exercice nécessaire, mais qui ne suffit pas pour gagner de nouveaux clients. Le principal défi à ce stade est de comprendre la sensibilité relative au prix de ceux qui vont comparer votre proposition à des produits très différents proposés par d’autres acteurs que les concurrents habituels du secteur restauration HRI.
Les prix de la concurrence qui vient du secteur restauration R
La concurrence qui vient d’en dehors du secteur restauration HRI
Un bon moyen de porter votre regard au-delà des limites du secteur de la restauration alimentaire consiste à dresser la liste des produits et des services qui se répartissent en deux catégories : ceux qui ont une forme différente, mais qui remplissent la même fonction que la restauration alimentaire (il est question ici de l’offre substitut) puis ceux qui s’en distinguent par leur forme et leur fonction, mais qui lui ressemblent du point de vue de l’objectif général du client.
Formes différentes… fonctions identiques (restaurer ceux qui ont faim)
Beaucoup d’entreprises ayant une proposition de valeur innovatrice arrivent à détourner les clients des autres secteurs dont le produit a la même fonction ou la même utilité fondamentale que le leur, mais se présente sous une forme très différente. C’est actuellement ce que nous constatons dans le secteur de la restauration traditionnelle qui voit ses parts de marché être accaparées par les épiceries, les boucheries, les fruiteries, les poissonneries, les fromageries, et, etc. qui ce sont tous mis à offrir une multitude de plats pour apporter prête à manger.
Formes et fonctions différentes… objectifs identiques
Certaines entreprises réussissent même à attirer des clients d’autres secteurs d’affaires encore plus éloignés.
Par exemple, ont peut supposer au départ qu’un restaurant à peu en commun avec une prestation du Cirque du Soleil. Le restaurant par définition accompli une mission différente que celle du cirque. On recherche au restaurant les plaisirs de la table plutôt qu’un spectacle visuel. Mais en dépit de cette différence de forme et de fonction, l’objectif des clients qui choisissent l’un ou l’autre (un samedi soir par exemple) est souvent dans les deux cas le même : passer une soirée agréable en ville. Le Cirque du Soleil avec son offre alternative entre donc en concurrence avec les restaurants.
Cherchez d’autres segments de clientèles que vous êtes susceptible de satisfaire avec votre offre
L’identification des produits ou services alternatifs permet de visualiser toute la gamme des acheteurs qu’on pourrait détourner d’autres secteurs d’activité.
Le but ultime de cet exercice est d’identifier d’autres segments de marché susceptibles d’être intéressés par votre offre et de déterminer quel prix les consommateurs appartenant à ces segments de marché acceptent de payer pour les produits et les services qu’ils utilisent actuellement.
Exemple :
Le restaurant Buddha bar de Paris, grâce à sa proposition de valeur très originale qui met l’accent sur l’ambiance et la musique, à réussit, depuis son ouverture en 1996, à conquérir une clientèle qui fréquente ce restaurant comme lieu pour passer la soirée plutôt que comme place où manger.
CONCLUSION
Il ne s’agit pas de positionner vos prix à l’intérieur d’un corridor uniquement par rapport aux prix moyens du secteur de la restauration alimentaire traditionnel, mais plutôt d’établir ceux-ci en fonction des offres concurrentes, qu’elles viennent des offres substitut comme les épiceries, les boucheries, et, etc. ou même d’autres secteurs d’activités comme : le cinéma, le théâtre ou le Cirque du Soleil par exemple.
⬅️ La fixation des prix : comprendre et capter de la valeur
Manuel de gestion-réflexion / Christian Latour
Pour communiquer avec Christian Latour 😎
• Sur Facebook : Christian Latour
• Sur Twitter : @Christian Latour
• Sur LinkedIn : Christian Latour, MBA