Nouvelle chronique
Des chiffres qui parlent
Cette nouvelle chronique a pour but de vous guider dans l’analyse des informations afin d’interpréter l’évolution du marché, de déceler les occasions et les menaces, et de prendre des décisions éclairées.
Tout au long de l’année, les entrepreneurs sont bombardés par une multitude d’informations sur l’évolution de l’industrie des hôtels, restaurants et institutions (HRI), laquelle est constamment l’objet d’études et de publications de statistiques. Certaines informations peuvent indiquer un phénomène réel, un enjeu important dont il faut tenir compte, et d’autres, représenter une fausse menace.
Par François Pageau, enseignant en gestion de restaurant à l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec
Principes d’une bonne information
1- La source doit être sûre. Certains organismes sont fiables, tels que Statistique Canada, la Canadian Restaurant and Foodservices Association (CRFA) et le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ). D’autres transforment la réalité ou ne représentent aucun intérêt. Il faut se méfier des rumeurs et des impressions lancées sans fondement.
2- Le sens des mots utilisés doit être clair. Qu’entend-on par restaurant commercial, indépendant, service complet, etc. ? Un index ou une définition est souvent nécessaire pour permettre une interprétation juste des résultats.
3- Attention aux pourcentages. L’utilisation des pourcentages est très pratique et généralisée pour comparer des résultats. Cependant, l’envergure des variations ne témoigne pas des valeurs réelles. Bien que le pourcentage soit élevé, cela ne révèle pas la variation ou la proportion réellement mesurée.
Nombre réduit d’employés et répartition des coûts pour les entreprises de restauration
Le MAPAQ publie périodiquement le Bottin statistique de l’alimentation, qui compile un ensemble d’informations et de statistiques sur les secteurs commercial et institutionnel des services alimentaires de la province de Québec.
- Constat 1
Les restaurants du Québec ont peu d’employés par établissement
« 55,4 % des établissements de services alimentaires commerciaux de base ont entre 1 et 9 employés ; 39,2 %, entre 10 et 49 employés ; et 4,9 %, entre 50 et 99 employés. Peu d’entreprises dans les secteurs de la restauration et des débits de boissons embauchent plus de 200 personnes. Notons que les entreprises qui exercent leurs activités dans le secteur des services alimentaires sont en majorité des entreprises indépendantes (71 %). »
Source : Bottin statistique de l’alimentation 2010, MAPAQ
Observations :
- Les entreprises de restauration, en grande majorité indépendantes, emploient individuellement peu d’employés, soit de 1 à 9 ETC (employés à temps complet).
- Le nombre d’ETC est directement lié au chiffre d’affaires, qui est, lui aussi, relativement bas en moyenne au Canada (617 518 $ en 2011).
- Ces emplois sont souvent payés au salaire minimum, ce qui fragilise davantage l’industrie, laquelle sera affectée par les hausses successives du salaire minimum. Cela révèle le potentiel limité du secteur de la restauration comme créateur d’emplois bien rémunérés et stables.
- L’industrie de la restauration emploie pourtant un nombre important de travailleurs (266 000, soit 6,7 % des emplois au pays) ; le nombre élevé d’emplois en restauration est plutôt attribuable au nombre élevé d’établissements.
- La polyvalence des employés est préconisée afin d’accroître la productivité.
- Constat 2
Le coût des marchandises correspond à un peu plus du tiers des revenus
« Parmi les coûts importants que les restaurateurs doivent supporter, notons ceux des aliments, des boissons et des marchandises diverses, qui représentaient 35,3 % des dépenses (2007). »
Source : Bottin statistique de l’alimentation, section industrie des services alimentaires-MAPAQ, 2010.
« Le coût des aliments et boissons représente 36 % des dépenses pour l’industrie canadienne. Les restaurants du Québec affichent une meilleure performance, d’autant plus que 71 % des restaurants québécois sont indépendants, comparativement à 63 % au Canada entier. »
Source : CRFA
Observations :
- Attention aux comparaisons, mais gardez votre food cost à l’oeil !
- Le ratio de « coût de marchandise » indique seulement la part accaparée du revenu total. Le coût réel des marchandises n’est bon ou mauvais qu’en le comparant avec le coût théorique qui variera selon la composition des ventes. On doit aussi tenir compte du niveau des ventes, car plus ce dernier sera bas, plus il est dangereux d’augmenter le coût de marchandise.
- Ce n’est qu’en dressant des inventaires réels que l’on peut mesurer le coût des marchandises en proportion des ventes.
- Si l’entreprise réalise un profit acceptable avec un food cost de 35,3 %, ce dernier sera viable, sinon, le coût de marchandise devrait être la première cible pour le gestionnaire qui cherche à améliorer sa performance.
- Le taux de 35,3 % n’augmentera pas si la croissance des coûts des matières premières se reflète sur une augmentation proportionnelle des prix de vente au menu.
- Il est délicat de comparer votre propre coût de matières premières avec le coût moyen puisque la méthode de calcul peut différer, ainsi que les produits inclus dans le calcul. Par exemple, le papier et les produits de nettoyage, les repas des employés, le café et autres boissons non alcoolisées. Affecte-t-on les escomptes des fournisseurs aux achats ou non ?
- Les marges bénéficiaires en dollars réels sont un bien meilleur indicateur de performance que le coût de nourriture.