Chic Alors ! : 30 ans... et toujours « vert »
Hugues Philippin affiche un parcours des plus étonnants. Depuis trois décennies maintenant, il porte à bout de bras son populaire restaurant de pizzas du quartier Cap-Rouge à Québec. Cet événement en soi pourrait déjà être considéré comme un exploit, si le Chic Alors ! n’était pas en plus considéré comme l’un des établissements les plus verts au pays.
« Ça a été un vrai petit laboratoire, ce restaurant-là, s’exclame-t-il lorsque questionné sur le début de cette belle aventure. On est allé voir un local [sur le chemin Jean-Gauvin, ndlr] avec mon associé de l’époque. Un petit comptoir, un téléphone, un four à pizza et une caisse enregistreuse. On s’est dit "Pourquoi pas ?". On n’avait rien à perdre. On avait tout juste 20 ans ! »
Alors livreurs pour le Pizza Mag de la rue Maguire, Hugues Philippin et son acolyte ouvrent initialement une succursale de ce restaurant dans ce quartier Cap-Rouge en plein développement. Mais l’idée de franchise sera rapidement abandonnée. Quant au partenaire d’affaires, il quittera le navire un peu moins de deux ans plus tard, au moment où les deux jeunes hommes s’apprêtent à entrer à l’université. Hugues Philippin est seul aux commandes. Et le Chic Alors ! est né.
« Je voyais ça plutôt comme un plan B. Dans les années ’90, le taux de chômage était assez élevé : je pensais ainsi me garantir un emploi », confesse Hugues Philippin qui, au terme d’études en génie mécanique, décrochait un poste chez Prévost Car. « Ce travail pour un ingénieur, c’était un peu le rêve, mais je stagnais. Je crois que le fait d’avoir un restaurant donnait à mes supérieurs l’impression que je ne pouvais pas faire de temps supplémentaire. » Il décide donc de faire le saut et de se concentrer uniquement sur son entreprise au début des années 2000.
Le virage vert
Avec son œil d’ingénieur, Hugues Philippin se met à tout analyser. Il s’interroge sur les rouages de l’entreprise dans leurs moindres détails, et notamment sur leur aspect écologique. « Ce n’était pas une grosse entreprise à l’époque, je cherchais à me désennuyer, confie-t-il. L’opération, ce n’est pas ce qui m’intéresse. Moi, j’aime le développement, arriver avec des solutions nouvelles et les implanter. Ce n’est pas seulement pour l’environnement ; c’est d’abord pour des raisons économiques et pratiques, mais ces solutions sont très souvent écologiques. »
Au cours de la seconde décennie de vie du restaurant, quelques agrandissements essoufflent les équipements d’origine. Des fours à convoyeur plus performants et moins énergivores viennent augmenter la rapidité et la constance de la production. C’est avec ce même souci de performance que le responsable implante un système de points de vente qui permet de faciliter la facturation. Une voiture électrique (la première au Canada dédiée à la livraison !) viendra également remplacer le précédent véhicule.
« Le Chic Alors !, c’était une vraie ruche. Tout était à sa place. C’était toujours plein, ça impressionnait les clients. On devait en refuser une cinquantaine par jour, se souvient Hugues Philippin. On s’est alors dit que ce serait le fun d’avoir une vitrine écologique et technologique, un nouveau restaurant pour notre 20e anniversaire, dans lequel on évoluerait pour les 20 prochaines années. »
L’ingénieur-restaurateur ne fait pas les choses à moitié : des vitres chauffantes et un système de récupération de chaleur des équipements font partie des plans d’origine du nouveau restaurant organisé sur deux étages et situé à quelques mètres de l’ancienne adresse. Des investissements qui peuvent sembler aujourd’hui à contre-courant dans le milieu. « Les restaurateurs peinent à s’imaginer dans trois ou cinq ans ; amortir des investissements sur sept ans dans un tel contexte, je comprends que ce n’est pas intéressant. Par contre, une fois ce cap passé, c’est 100 % des économies qui reviennent en profit et ça nous rend plus forts », explique-t-il.
Hugues Philippin est un homme de défis et de projets, au regard toujours tourné vers l’avenir. Pourtant, lorsqu’on lui demande quels sont ses prochains objectifs, il nous assure avoir « pas mal atteint » ce qu’il visait. « On va consolider ce qu’on fait déjà. On a même réussi à passer de 90 % à 97 % de déchets détournés de l’incinérateur. C’est un restaurant assez unique, je crois que ça va rester comme ça », se défend-il.
Mais en reformulant un peu la question, on apprend que l’inépuisable homme d’affaires s’apprête à ouvrir une petite boutique de pâtisserie à l’entrée du restaurant. Et qu’il envisage également un réaménagement de la salle pour la remettre au goût du jour et y installer un système de contrôle de bruits. Ces deux projets sont toutefois sur la glace : le contexte actuel de pandémie incite à jouer de prudence... Même pour les plus audacieux entrepreneurs.
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(Crédit photo : Caroline Grégoire, gracieuseté Hugues Philippin)