Projet de loi 72 : qu’en est-il des pourboires ?
Attendu depuis longtemps, le projet de loi 72 qui réforme la loi sur la protection des consommateurs a été déposé la semaine dernière à l’Assemblée nationale du Québec par le ministre de la Justice Simon Jolin-Barette.
La nouvelle législation vient modifier le cadre réglementaire entourant les propositions de pourboires sur terminaux de paiement électroniques. Essentiellement, celles-ci devront désormais être calculées sur le montant de la facture avant taxes plutôt que sur celui comprenant les taxes comme c’est généralement le cas aujourd’hui.
De plus, les terminaux de paiement devront clairement offrir aux clients l’option de ne pas donner de pourboire ou encore de saisir eux même une autre option que celles suggérées par le commerçant. « Rappelons que l’option de saisie manuelle est déjà offerte sur nos plateformes et qu’elle est un standard de l’industrie », souligne Denis Robert, vice-président exécutif, Développement des Affaires et Marketing chez Payfacto.
Il précise aussi que les restaurateurs ont déjà le choix de ne pas proposer de montant de pourboire préétabli en configurant leurs appareils et qu’une nouvelle fonctionnalité permettant d’offrir des suggestions de pourboire sur les montants avant taxes sera disponible à temps pour l’entrée en vigueur de la nouvelle législation.
« Ce n’est pas une option pour l’instant parce que le pourboire calculé sur les taxes était une façon de faire bien implantée dans l’industrie que personne ne contestait parce que ça améliorait le revenu des serveurs. Mais maintenant que c’est nécessaire, nous devrions être en mesure d’offrir cette option rapidement », résume-t-il.
Par communiqué, l’Association Restauration Québec (ARQ) rappelle que le changement pourrait même entraîner des conséquences fiscales positives pour les restaurateurs en diminuant la part employeur à payer aux programmes d’assurance-emploi et d’assurance parentale. Par contre l’association prévient que « la décision va surtout impacter le revenu des employés en salle, bien qu’une analyse plus profonde soit nécessaire pour connaître les conséquences sur le maintien en emploi de ceux-ci. »
Une ouverture pour les factures par courriel ?
Le projet de loi 72 redéfinit également le cadre entourant les factures et les contrats transmis de façon électronique. Le texte de loi semble suggérer que les restaurateurs pourraient désormais transmettre uniquement la facture concernant des repas par courriel, mais ne précise pas s’ils devront conserver des imprimantes sur place pour satisfaire les clients qui souhaitent tout de même obtenir une copie papier. Questionnés à ce sujet, le ministère de la Justice ainsi que le cabinet du ministre Simon Jolin-Barette n’ont pas donné suite à nos demandes. Il faudra donc attendre l’étude détaillée du projet de loi pour saisir la portée de ce changement sur les restaurateurs. Celle-ci devrait avoir lieu cet automne.
Rien pour les « no show »
Le projet de loi déposé par le gouvernement Legault serait toutefois une occasion manquée de la part du gouvernement d’intervenir pour permettre aux restaurateurs d’imposer des frais aux clients qui n’honorent pas leurs réservations, selon l’ARQ. L’association prévient qu’elle interviendra en commission parlementaire pour tenter de convaincre le gouvernement d’ajouter des mesures en ce sens. Questionné à savoir s’il était ouvert à écouter les griefs des restaurateurs et éventuellement à intervenir dans le dossier, le cabinet du ministre Simon Jolin-Barette n’a pas répondu à notre demande.
La nouvelle réglementation entourant les pourboires entrera en vigueur six mois suivant l’adoption de la loi. Elle devrait donc être effective à l’été 2025.