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Montréal sur la mappe OMNIVORE

Pour une 2e année, le festival Omnivore s’est arrêté à Montréal du 14 au 19 août. Cet évènement qui se veut un défricheur de nouveaux talents et territoires culinaires a été lancé par le journaliste français Luc Dubanchet (la première édition a eu lieu en 2006 au Havre). Depuis 2012, il a pris une dimension internationale en faisant son « World Tour ». Montréal est sur sa route avec sa « jeune cuisine » qui a de nouveau fait preuve de créativité, de sincérité et d’une belle humilité.

 
21 août 2013 | Par Sophie Suraniti

Les démonstrations culinaires du 17 août qui se sont déroulées sous le dôme de la SAT furent toutes de qualité. Les cinq chefs montréalais (dommage que les régions ne fassent pas partie du repérage) et les trois « internationaux » (deux chefs basés à Paris et un duo new-yorkais, seule démonstration sans intérêt de la journée) qui s’y sont succédé avaient des choses à dire, à montrer, à exprimer. Voici quelques grands marqueurs de cette nouvelle génération de chefs qui portent naturellement leur réflexion dans l’assiette…

Le partage, les autres. Les chefs proposent de plus en plus des plats conviviaux, sans chichis, préparés sur un mode instinctif, selon les humeurs et les produits disponibles. On prend, on goûte, on aime puis on partage. « Je trouve qu’on ne donne pas assez » a répété Pierre Sang Boyer, dont le petit restaurant à Paris fonctionne sans réservations, sans menu, sans plats signature. Un chef « libre » qui veut rendre la cuisine accessible.

Le travail de recherche, la mémoire. Michelle Marek du Labo culinaire de la SAT avait l’an passé marqué les esprits par sa prestation très touchante inspirée de ses souvenirs personnels. Cette fois encore, c’est avec toujours autant de délicatesse que la chef pâtissière (et chef cuisinière, car avec son acolyte Seth Gabrielse le duo monte des cartes thématiques qui changent régulièrement) a exploré l’utilisation du fromage frais dans divers plats notamment originaires de l’Europe de l’Est. Mi-plats, mi-desserts, la chef a une fois de plus joué avec les frontières du salé sucré.

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La démonstration de la chef Michelle Marek dont on peut voir sur l’écran de projection sphérique de 360 degrés de la SAT ses brioches fourrées d’une délicate crème fromagère et de bleuets sauvages.

La curiosité. Celle de tout faire soi-même (son pain, son fromage...) et d’apprendre par essai et erreur. Mais aussi la curiosité d’aller fouiller dans d’autres répertoires culinaires. Les voyages forment et inspirent toujours autant les chefs – même si le terroir s’est imposé comme la nouvelle religion ! Marc-André Leclerc de Grumman78 nous a livré un beau voyage entre la Chine et le Mexique. La Chine à travers son « mapo tofu » (sorte de bolognaise d’origine sichuanaise) et le Mexique avec des tortillas maison à l’encre de seiche. Le chef aime toujours autant la cuisine fusion (et il l’a défend bien) sans toutefois trop la pousser. « On est allés trop loin à un moment donné », avouera-t-il.

Le chef Marc-André Leclerc (à droite sur la photo) et l’un de ses sous-chefs. Tonique, curieux. Un chef qui explore et fusionne.

L’influence scandinave. Elle est encore bien présente et à deux reprises, en matinée, la philosophie du chef René Redzepi a été évoquée. Notamment par Aaron Langille ancien chef du Café Sardine qui devrait ouvrir d’ici peu son Orange Rouge dans le quartier chinois de Montréal. Le jeune chef reste marqué par la philosophie du Danois « The sense of time and place » qu’il a pu observer lors de son stage au Noma. « Il a changé ma vision de cuisinier. Son influence est majeure dans la gastronomie mondiale actuelle. »

Magnifique plat d’influence asiatique du chef Aaron Langille : crabe vapeur (cuit dans des paniers en bambou), boutons de tournesol (dont le goût s’apparente à celui des artichauts), radis "queue-de-rat" (dont les cosses rappellent le piquant d’un radis), blé d’Inde cru...

La récupération. Comment travailler un produit au maximum afin de limiter le gaspillage ? Cette démarche fut bien illustrée d’abord par Marc-Alexandre Mercier de Hôtel Herman qui à travers son plat œufs de caille-giroles a montré comment il utilisait les parures de giroles pour ensuite en faire du vinaigre, de l’huile, etc. Mais l’autre atelier marquant sur le sujet fut celui de Charles-Antoine Crête du Toqué ! En reprenant les grands points d’une conférence qu’il donne avec Normand Laprise intitulée « Cooking from Scrap » (« Cuisiner avec des retailles »), le chef a expliqué avec humour comment il créait à partir de tous ces mal-aimés des cuisines qui partent à la poubelle, ainsi que de la notion de respect des produits. « Respecter le produit au complet, c’est l’utiliser à 100% ». Pour illustrer ses propos, Charles-Antoine Crête a alors déposé en grands jets sur une toile blanche le fruit de toutes ces récupérations, concentrations et transformations (poudres, cubes de jello, huiles, sels…). Tel un peintre sur une toile blanche. Brillant.

Le résultat de la démarche hautement créative et responsable du chef Charles-Antoine Crête. Les retailles se font artistiques.

La simplicité. Celle de revenir à des gestes d’autrefois, à des saveurs « simples ». Le plat de pâtes fait par le duo du Rino à Paris (28 places), le chef Giovanni Passerini et son sous-chef Michele Farnesi, fut une belle reconnaissance de ce que faisaient les « anciens », sans toutefois sombrer dans la nostalgie. « On fait avec ce qu’on a ». Imaginons donc qu’il est deux heures du matin et que les cuisiniers du Rino vont passer à table. Les pâtes sont alors cuites comme un risotto. Un geste rempli de générosité et de respect du patrimoine italien.


L’an dernier, le boudin noir avait eu son heure de gloire (au moins présent dans trois démonstrations !). Cette fois, ce sont les boutons de fleur de tournesol qui ont brillé !</


Photos : Sophie Suraniti

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Mots-clés: 06 Montréal
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Restauration

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