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Point de vue

Est-ce vraiment la faute d’El Niño ?

 
14 mars 2016 | Par Robert Dion

La restauration est en période de mutation et toutes les raisons semblent bonnes pour expliquer la situation : El Niño en est une. Il semble responsable autant de l’augmentation du prix des denrées que de la modification des périodes d’affluence touristique. Or, est-ce vraiment la faute d’El Niño ?

Je crois que la restauration et l’hôtellerie subissent des changements majeurs. L’hôtellerie a peut-être su s’adapter plus rapidement grâce au Yield management, ce que la restauration n’a pas su faire. Ce secteur a toujours tenté d’absorber au maximum les augmentations de prix pour éviter l’explosion des prix de vente. Sommes-nous rendus au bout de l’équation ? Est-il temps que les restaurants vendent au bon prix ? N’est-ce pas le temps de réaliser qu’il vaut mieux privilégier la formule « moins de clients, plus de profits » plutôt que l’inverse ? Dans le même ordre d’idées, la méthode de calcul des prix de vente actuelle ne devrait-elle pas être repensée ? Le « x 3 » devrait-il être encore la norme ?

Se questionner est un pas dans la bonne direction. D’ailleurs, il y aura cette année au SIAL CANADA de Montréal un sommet sur l’établissement des coûts lors duquel plusieurs intervenants aborderont notamment les questions de ressources humaines (avec encore une hausse du salaire minimum), du coût des matières premières qui fluctue et des façons de s’assurer de vendre au bon prix sans sacrifier le profit.

Évidemment, nous subirons toujours des augmentations de tarifs. Rares sont les produits dont le prix n’a pas récemment atteint de nouveaux sommets. Pour quelle raison les prix de vente n’ont-ils pas suivi cette tendance inflationniste ? Là est la question. C’est la restauration qui en subit les contrecoups maintenant puisque les marges de profit n’ont jamais été aussi basses.

Tout comme El Niño, ce phénomène cyclique, surfez sur la vague de l’instabilité et profitez-en pour revoir votre approche dans la fixation de vos prix de vente.

Sur ce, bonne préparation pour cette belle saison qu’est le printemps.

Photo : © David Cannon

 
 
Billet de la rédaction

On est tous un peu Y

 
14 mars 2016 | Par Redaction Carufel

Ouf ! Voilà qui me rassure ! Un spécialiste de la génération Y me l’a confirmé alors que j’étais un peu surprise (catastrophée, en fait !) de me reconnaître, moi, une X, dans une description de la génération qui suit la mienne : on a tous un peu d’Y en nous !

Le fait est que plus on découvre les individus qui forment ce groupe (autant les clients que les collègues et les employés Y), plus on apprend, à défaut de les comprendre, à vivre avec leurs traits de caractère et leurs attentes particulières. L’industrie hôtelière a bien compris que cette clientèle sera sa clientèle la plus importante d’ici quelques années. Le monde de l’hôtellerie a donc amorcé son adaptation en ce sens.

Or, comme pour tout le monde, les vilains défauts des Y sont compensés par de véritables atouts propres à leur génération. Comme ils en sont friands, on leur doit assurément les avancées technologiques maintenant offertes dans le domaine de l’hospitalité. Deux articles de ce numéro mettent parfaitement en lumière ce phénomène. Dans un premier temps, vous pourrez lire une étude réalisée par des étudiants de l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec (eux-mêmes des Y !) ayant pour thème les innovations hôtelières. Puis, nous vous présentons dans la chronique hôtelière la description de quelques chaînes s’adressant directement à la génération Y et ayant pris ce tournant au cours des derniers mois.

La X que je suis est très emballée par les nouveautés mises en place pour les Y… et c’est sans gêne que je vais en profiter, avec mon petit côté Y !

Photo : © David Cannon

 
 
Personnalité HRI

Mathieu Laperle

Je travaille, donc j’étudie

 
14 mars 2016 | Par Marie-Carole Daigle

Un grand principe régit la vie professionnelle de Mathieu Laperle : il cherche constamment à parfaire son éducation tout en travaillant. Résultat ? L’homme s’est créé une carrière passionnante qui lui a procuré des occasions de se réaliser dans des circonstances auxquelles il n’aurait jamais pensé. Entretien avec le directeur principal du Logement étudiant et d’hôtellerie de l’Université McGill.

Mathieu Laperle a une feuille de route impressionnante. Il a aussi la passion de son travail – une passion perceptible au simple timbre de sa voix lorsqu’il en parle. On sent que le désir de toujours faire mieux l’habite en tout temps.
Diplômé en 1993 de l’ITHQ (Gestion de restaurant), le jeune Laperle amorce sa carrière en se « promenant un peu ». Il travaille notamment au Château Champlain, au Reine Élizabeth et au Casino de Montréal avant d’officier durant deux ans comme maître d’hôtel de la Délégation du Québec à Paris. Il y explore les types de restauration offerts dans les alentours, par exemple en visitant des vignobles et en faisant un stage dans un « trois macarons » Michelin.

Une fois de retour au pays, il suit un cours de sommellerie, ce qui lui permet de devenir quelques années plus tard maître d’hôtel et gestionnaire de la cave à vin du Casino du Lac-Leamy. Parallèlement, il obtient une mineure en études hispaniques et un baccalauréat en ressources humaines et marketing des HEC. Cet acquis lui permet de présenter sa candidature à une offre d’emploi faisant de lui le premier gestionnaire des services alimentaires de… l’Université d’Ottawa ! « En toute sincérité, je n’avais jamais pensé qu’il aurait pu y avoir des emplois intéressants dans ce domaine ! Mais cet employeur voulait rehausser l’image – et les ventes — de ses services et souhaitait pour cela embaucher quelqu’un du privé. »

Mathieu Laperle attaque le mandat de front. Il reste en place sept années, au cours desquelles il termine sa maîtrise en administration publique, ce qui lui vaut l’appel d’un chasseur de têtes en 2009. On lui propose alors le poste de directeur des services alimentaires de l’Université McGill. Il accepte et se retrouve finalement à avoir carte blanche pour faire faire un virage complet aux services de restauration et d’hébergement de l’établissement, tout en soignant les relations syndicales. Assortie d’un budget de 62 millions de dollars, sa tâche est colossale : « Je veille sur l’ensemble des services offerts – des ressources humaines à la négociation des contrats en passant par le financement, la gestion des installations et la programmation de la vie étudiante », énumère-t-il. Le dénominateur commun de sa démarche : faire du campus non seulement un endroit où l’on acquiert des connaissances, mais aussi un milieu de vie à saveur montréalaise. Sous sa gouverne, McGill fait de ses services alimentaires une valeur ajoutée qui la distingue des autres. Ainsi, pour l’anecdote, mentionnons que l’Université a décroché le record du plus gros brownie équitable l’an dernier et, cet automne, celui du plus gros frappé aux fruits au monde. On est loin d’un programme qui se contente de faire rouler son menu pendant neuf jours…

« Je n’aurais pas le poste que j’occupe aujourd’hui si je n’avais pas poursuivi mes études, mentionne Mathieu Laperle. L’investissement en a valu la peine. Ma formation initiale m’a donné un bon départ, mais mes diplômes complémentaires m’ont outillé, par exemple pour négocier des conventions collectives. De nos jours, on n’a pas le choix : il faut constamment se former et aller voir ce qui se fait ailleurs ; cela peut ouvrir des portes auxquelles on ne penserait jamais. » Comme celles d’une université.

Photo : © Pierre Beauchemin

 
 
Personnalité HRI

Emmanuel Renaut

Au sommet de sa cuisine et de sa montagne

 
14 mars 2016 | Par Sophie Suraniti

C’est la deuxième fois que le chef cuisinier français Emmanuel Renaut vient au Québec. Un passage éclair, en réponse à l’invitation de la Fédération des producteurs acéricoles du Québec pour lancer gustativement la saison 2016. Le sirop d’érable ? Un vrai coup de cœur pour ce Savoyard.

« Ce produit me parle beaucoup. Lorsque je suis venu ici en mai 2015¹, j’ai découvert le sirop d’érable. En France, on ne connaît pas du tout ce produit et ses méthodes de fabrication. Il y a cette notion de terroir, cette notion de saisonnalité qui est vraiment intéressante. Depuis tout petit, je marche dans la nature, je cueille des plantes, des champignons, je ramasse des écorces, des épines de sapin. Ce produit de la nature m’interpelle donc forcément. » Pourtant, rien ne prédestinait ce chef qui cumule aujourd’hui plusieurs titres honorifiques (trois étoiles Michelin depuis 2012 pour son hôtel-restaurant Flocons de Sel à Megève, Meilleur Ouvrier de France, Compagnon du Tour de France, Chef Relais & Châteaux…) au travail de cuisinier.

Lorsqu’on ne s’inscrit pas dans une lignée, ce qui compte, ce sont les rencontres, celles qui provoquent un déclic. Pour Emmanuel Renaut, natif de la région parisienne, la passion pour la cuisine se vivra à 200 % à la suite d’un stage au restaurant de l’hôtel Crillon (Les Ambassadeurs) auprès du chef Christian Constant. Avant ? « Il y a trente-deux ans, lorsque j’ai commencé, le milieu de la cuisine n’était pas aussi brillant, encensé, starifié. J’ai arrêté l’école à 16 ans. J’ai fait deux ans d’apprentissage en cuisine, sans plus. » Or, entre l’effervescence parisienne et la zénitude de la nature, la décision est vite prise. Emmanuel Renaut quitte la capitale pour les verts pâturages et le bleu profond du lac d’Annecy où se trouve l’Auberge de l’Eridan. Ce qui ne devait être au départ qu’une saison de travail comme second auprès du chef-cueilleur Marc Veyrat se transforme en sept ans de binôme. Puis, Emmanuel Renaut quitte Veyrat, dirige un an les cuisines du Claridge’s à Londres, et revient en Haute-Savoie pour ouvrir son Flocons de Sel. 1997. Megève. La montagne. Au tournant des années 2000, son petit établissement (neuf chambres et 35 couverts) perché sur les hauteurs de la ville, au pied du Mont-Blanc, opère alors un virage dans les assiettes. « J’ai décidé d’arrêter les poissons de mer et de les remplacer par des produits du lac et de la montagne, ceux qui nous entourent. » Sa clientèle le suit, prête à se laisser mener, à plonger dans cette nouvelle identité terroir affirmée. « Je fais la cuisine parce que j’aime la nature, le produit. Tout simplement. Aujourd’hui, je m’aperçois que c’est dans l’air du temps. »

Au programme du chef, outre pousser encore plus loin la valorisation des produits de sa région et revenir au Québec pour un séjour plus long, plus nature, il y a aussi la transmission. Transmettre auprès de ceux qui l’entourent. « Je rencontre plein de jeunes cuisiniers passionnés. C’est un métier d’échanges et à la fois égoïste ! Il faut donc savoir partager. À part le contexte économique actuel qui rend plus difficile l’installation (pour ma part, j’ai la chance d’être chef propriétaire, de ne pas avoir d’investisseurs), la cuisine n’est que passion. Pour le reste, il n’y a pas de règles. »

Flocons de Sel, à Megève, en France : floconsdesel.com


  • ¹ À l’occasion du 7e événement-bénéfice Les Grands Chefs Relais & Châteaux au profit de la Fondation de l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec.

Photo : ©Francis Hammond

 
 
Autres

Sirops et arômes à boire

La modernité retrouvée

Oubliés, confinés à certains usages, perçus comme vieillots, les sirops se taillent depuis peu une nouvelle place grâce au regain d’intérêt pour le monde des boissons, chaudes ou froides, et particulièrement celui des cocktails. Deux réalités cohabitent sur le marché, aux antipodes l’une de l’autre : les sirops issus de procédés industriels versus ceux fabriqués artisanalement.

 
14 mars 2016 | Par Sophie Suraniti

COMMENT S’EXPLIQUE CETTE NOUVELLE CULTURE SIROPS ?

LE MONDE DU CAFÉ : l’offre de cafés élaborés ou spécialisés, de thés de type chaï, de frappés aux fruits (smoothies) et autres boissons chaudes ou froides s’accompagne désormais d’une palette de sirops au caramel au beurre salé, à la fève tonka, au chocolat praliné, au brownie…

LA TENDANCE COCKTAILS ET COCKTAILS SANS ALCOOL : un sirop va en effet permettre de combler l’absence d’alcool (sirop de mojito, sirop piña colada), de proposer des saveurs inusitées (sirop fumé), finalement de vivre une expérience cocktail sans avoir l’air à part, voire d’apporter de la couleur (sirop de curaçao). Cet engouement pour les cocktails sans alcool s’observe autant en Europe qu’aux États-Unis. Il répond aux demandes d’une certaine clientèle (féminine, d’affaires) et au désir d’une consommation plus saine et responsable.

LA RÉGLEMENTATION QUÉBÉCOISE : notre réglementation ne permet pas de « dénaturer » les alcools. Impossible par exemple de mettre une gousse de vanille dans une bouteille de rhum. Les barmans doivent préparer leurs sirops et leurs amers à part et les ajouter aux alcools au moment de servir le client. Les sirops leur permettent donc de travailler les arômes et d’aller chercher des saveurs en amont.

LES CONCEPTS RESTO-BAR : les chefs confectionnent des sirops façon mixologie ; les baristas et les barmans puisent leur inspiration en cuisine.

LA PÂTISSERIE : elle connaît une consécration qui lui permet de s’emparer des produits offerts, de les détourner, d’en créer de nouveaux.

L’ÉVOLUTION DU MARCHÉ DES EAUX : face aux sodas, le marché des eaux, en particulier celui des eaux aromatisées, gagne du terrain (voir notre dossier Boissons et eaux gazeuses, un marché effervescent¹) ; et avec lui, celui des machines à sodas et des concentrés aromatisés².


Espace Pro Al ambika

Situé au 6674, avenue de L’Esplanade, suite 300, à Montréal, le nouveau comptoir de dégustation Espace Pro Alambika est réservé aux gens de l’industrie. « Son emplacement juste en face de la SAQ Restauration Saint-Zotique se veut un arrêt unique pour la verrerie, les accessoires de bar et les ingrédients pour les cocktails. En présentation également : celliers à vin et couteaux japonais. Les restaurateurs auront accès à des prix spéciaux et des grands formats. Ils pourront goûter à tout et seront accompagnés dans l’élaborationt de leur menu cocktail par nos conseillers. »

Photo : © Jean-Sébastien Michel / Alambika


Cahoots, jeune entreprise de Vancouver (2014) lancée par deux anciens designers, propose une gamme de sirops infusés à froid à base d’ingrédients 100 % naturels (sucres, herbes…) provenant de sources renouvelables.


MOINS, MAIS MIEUX : LA NICHE DES SIROPS ET DES AMERS ARTISANAUX

« Au Québec, le marché est en pleine expansion. Jusqu’à 2010, seuls les produits des grosses compagnies étaient offerts : Marie Brizard, Monin, Teisseire… Entre 2007 et 2010, plusieurs entreprises américaines ont commencé à sortir des sirops toniques et là, on a vraiment assisté au début d’une nouvelle tendance avec le retour de ces vieux sirops artisanaux », précise Patrice Plante, mixologue basé à Québec, auteur de livres et de cours, qui vient de lancer sa gamme de produits.

Les sirops artisanaux cumulent les atouts : qualité des matières premières, procédés de fabrication basés sur la macération, image de marque attrayante et produits signature. « Nous travaillons avec de la matière brute, avec des procédés tels que l’infusion et la macération, contrairement aux sirops génériques faits avec des arômes naturels ou artificiels à partir de concentrés (cela pouvant être très bien fait au demeurant). Nous n’avons pas cette partie “chimie” », explique Fabien Maillard, mixologue, propriétaire du Lab, comptoir à cocktails à Montréal, qui a également lancé avec sa partenaire d’affaires une gamme de produits appelée Les Secrets du comptoir.
Pour Alexandrine Lemaire et Hannah Palmer, les créatrices des sirops de la marque 3/4 oz, « Il est facile de convaincre les clients que les sirops artisanaux valent le goût et le coup ! Et que leur polyvalence est l’un de leurs grands points forts. »

Les sirops artisanaux étant plus goûteux, on en met donc moins. Pour le même prix, le client a un cocktail plus intéressant en matière de saveurs. Quant à l’établissement, il fait non seulement des économies de coût et de stockage, mais de plus, sa carte est bonifiée.


3/4 oz., le sirop polyvalent

Une gamme de sirops pensée pour le bar à la maison. Avec leur gamme actuelle de trois sirops, les deux fondatrices de la marque, Alexandrine Lemaire et Hannah Palmer, couvrent tous les types de spiritueux.

Photo : @34oztonicmaison


Outre sa gamme actuelle de six sirops artisanaux, Le Lab a lancé au printemps 2015 un amer, le Bitter Lim’Tonik.

Photo : © Bar le Lab


Monsieur Cocktail et ses sirops basiques

La gamme de sirops de Patrice Plante joue (entre autres) la carte des basiques. Donner des outils aux utilisateurs pour qu’ils se sentent à l’aise.

Photo : © Monsieur Cocktail


Les Charlatans, le sirop se cuisine

Avec sa dizaine de sirops et poudres, Jeanne Boucharlat place le sirop artisanal à la rencontre de deux mondes : celui des boissons et celui de la cuisine. Distribués par Jesemi (format 32 oz pour le HRI).

Photo : © Étienne Marquis


TOUJOURS PLUS : LE GRAND DÉPLOIEMENT DES SIROPS INDUSTRIELS

Les grands producteurs attaquent sur tous les fronts (clientèles, usages – le sirop présenté comme un ingrédient culinaire à part entière), multiplient les innovations en matière de présentation, d’emballages ou de formats (perles, dosettes individuelles ; par exemple les Gourmet Drop de Teisseire) et leurs catalogues de saveurs dépassent la centaine ! Aujourd’hui, les parfums proposés misent sur l’originalité pour redynamiser le marché. Parmi les nouveautés de l’industrie des sirops : les concentrés aromatisés (ou aromatiseurs d’eau) pour les machines à soda, les versions gourmet destinées à la cuisine, les gammes naturelles ou biologiques (pur sucre de canne, provenance des ingrédients), les produits allégés ou sans sucre (utilisation d’édulcorants de synthèse comme l’aspartame ou le sucralose, des sucresalcools comme l’érythritol, de la stévia…) et des gammes … spécialement conçues pour les professionnels du bar ou du café (comme Sirops Barista de Marie Brizard).


LE QUÉBEC, UNE CLASSE DE SIROPS (ET D’AMERS) À PART

En ce qui concerne la nouvelle culture des sirops, le Québec se porte bien. Très bien, même ! Rien qu’à Montréal, au moins six entreprises artisanales se sont lancé dans la fabrication de sirops et, plus récemment, d’amers. Ces jeunes entreprises travaillent étroitement avec le milieu du bar (ou en sont issues) et proposent toutes des produits de qualité : 3/4 oz (trois sirops), Djinn (des sirops plus près des jus frais concentrés), LEMO Limonade (trois sirops), Les Charlatans (une dizaine de sirops et deux poudres), la gamme Les Secrets du comptoir du bar Le Lab, comptoir à cocktails (six sirops et un amer), Sombre & Amer (les premiers à Montréal à ne proposer que des amers ; trois pour le moment). À Québec, le mixologue Patrice Plante propose avec la marque Monsieur Cocktail une gamme de sirops (quatre pour le moment) et lancera à l’automne prochain sa gamme d’amers.


À SUIVRE DE PRÈS : LE MARCHÉ DES SUCRES AROMATISÉS ET DES POUDRES

Celles que l’on met au bord des verres pour givrer (les « rims » en anglais), ou directement dans un mélange ou que l’on saupoudre. Un marché énorme, plein de potentiel selon Jean-Sébastien Michel (Alambika) qui constate que l’offre en garnitures de cocktails de qualité se diversifie aussi. Déjà, les grands s’y mettent (Monin a sorti sa gamme de poudres pour frappés aux fruits et boissons givrées) et les petits aussi. Au Québec, Marie-Dominique Rail, chef propriétaire de l’entreprise MChef, a créé une gamme de cinq mélanges de sucres aromatisés pour cocktails et mixologie (voir la section nouveautés en page 74). Prochains produits prévus pour le printemps 2016 ? Une gamme de poudres de fruits déshydratés, sans sucre, à l’état brut, pour la mixologie, la cuisine et la pâtisserie. Enfin, Jeanne Boucharlat, créatrice des sirops Les Charlatans, propose deux poudres : fraises et argousier.

Les sucres aromatisés de MChef

Marie-Dominique Rail, la chef propriétaire, a créé une gamme pleine de « sans » : sans allergènes, sans agents de remplissage (gluten, maïs, cellulose…), sans gras trans, sans produits laitiers, sans noix ou graines de toutes sortes. Pour tous types d’alcool ou de préparations, salées ou sucrées.


LES SAVEURS ET LES ARÔMES VEDETTES

Pour les sirops industriels, le champ d’inventivité semble illimité en ce qui concerne les arômes. Festifs, gourmands, à desserts… les fabricants créent des gammes pour sortir le sirop des usages classiques en s’adaptant aux goûts culturels et aux recettes locales (par exemple, sur les quelques 140 parfums Monin, 10 % sont propres à certains pays).

Pour les sirops artisanaux, les gammes commercialisées sont plus serrées, plus nichées, avec de grandes catégories reines :

  • LES SIROPS TONIQUES : Ils ont ouvert le bal des sirops artisanaux aux États-Unis, et aussi au Québec, où le gin-tonic demeure l’un des plus gros vendeurs.
  • LES SIROPS DE COLAS : plus populaires aux États-Unis qu’ici, mais tout de même bien présents.
  • LES SIROPS AUX COMBINAISONS DE SAVEURS ORIGINALES : ananas-barbecue, lime-poire, gingembre-orange, sirops floraux, épicés, de fines herbes, de noix, de houblon, de vin chaud, de betterave, etc.
  • LES SIROPS SIMPLES : fabriqués à partir de sucres plus typés (sucre de canne, demerara, mélasse, agave, érable, miel…).
  • LES SIROPS DE GINGEMBRE : pour tous les classiques nordaméricains revisités (soda au gingembre, ginger beer…).
  • LES SHRUBS : comme l’un des cocktails nord-américains les plus populaires est le Bloody Caesar, est apparue sur le marché une offre de sirops vinaigrés. Le shrub, croisement entre un jus, un sirop et un vinaigre, apporte l’acidité nécessaire pour contrebalancer les recettes de cocktails.

Quant aux amers, même si l’épicentre se trouve encore aux États-Unis, Jean-Sébastien Michel, propriétaire de la boutique Alambika à Montréal qui vient d’ouvrir un espace pour les professionnels de l’industrie, s’attend à ce que ce marché explose d’ici deux ans au Québec en raison de la croissance des microdistilleries (une bonne dizaine à l’heure actuelle). La tendance généralisée étant celle d’un retour aux classiques, à la simplicité, avec très peu d’ingrédients.

AU-DELÀ DU MARCHÉ DES BOISSONS CHAUDES OU FROIDES, AVEC OU SANS ALCOOL, LA NOUVELLE CULTURE DES SIROPS GAGNE LE MONDE DE LA CUISINE ET DE LA PÂTISSERIE

Émulsionner des vinaigrettes, aromatiser des ganaches ou des sauces, ajouter dans des marinades, des préparations crues (tartares, carpaccios), des appareils à gâteaux, utiliser en laquage, verser simplement et directement sur des crêpes… l’emploi des sirops et des amers suit la créativité des chefs, pâtissiers, barmans et baristas avec lesquels s’associent les marques pour stimuler le marché.


  • ¹ Magazine Hôtels, Restaurants & Institutions, Été 2015. volume 19, numéro 2.
 
 
Tendances

Milléni@ux

L’expérience : nouvelle monnaie de l’industrie hôtelière

L’arrivée de la génération Y sur le marché du travail a bouleversé l’industrie hôtelière alors que cette dernière a dû s’adapter aux demandes et aux attentes des milléniaux. Cette génération diffère grandement de la génération précédente (la génération X) sur plusieurs points, notamment sur l’importance accordée à la technologie et à l’expérience.

Par Karine Bourget, consultante chez Horwath HTL

 
14 mars 2016

Génération Y. Génération des milléniaux. Cette génération semble être sur toutes les lèvres. Qui est-elle exactement ? On s’entend généralement pour dire qu’il s’agit des gens du groupe démographique nés entre le début des années 1980 et le début des années 2000, ce qui signifie que ce segment de population comprend les jeunes qui ont d’environ 16 à 35 ans.


Photo : © CitizenM

Hôtel Alt

TECHNOLOGIE : #UNENÉCESSITÉ

En ce qui concerne la technologie, plusieurs chaînes hôtelières, dont Hilton Worldwide et Starwood Hotels & Resorts, ont lancé le bal avec l’introduction de l’enregistrement à l’aide d’un téléphone intelligent (plutôt que de faire la file à la réception) et le fait d’utiliser ce téléphone en guise de clé de chambre dans certains de leurs établissements. Hilton Worldwide pousse l’enveloppe encore plus loin puisqu’il sera possible dans un avenir rapproché de sélectionner à distance une chambre avec un plan d’étage interactif incluant une photo des chambres.

La connectivité est la clé pour les milléniaux, alors qu’ils se tournent vers les médias sociaux afin de décider où aller, quoi faire et où dormir, pour ensuite partager leurs propres expériences. Afin de suivre cette tendance, les hôtels encouragent les clients à utiliser les mots-clics (hashtags) sur leurs photos et à créer des espaces sur Instagram, et ce, en temps réel.

Les milléniaux font leurs recherches, leurs réservations et leurs enregistrements sur leurs téléphones intelligents et sur leurs tablettes. Évidemment, ils s’attendent à ce qu’un accès à Internet sans fil gratuit soit offert et sont outrés lorsqu’il faut payer pour ce service qu’ils tiennent pour acquis.

Ainsi, les milléniaux s’attendent à ce que leurs expériences de voyage soient une extension de leur vie mobile.


L’expérience vécue est la nouvelle monnaie de l’industrie hôtelière


EXPÉRIENCE : AU CŒUR DES PRÉOCCUPATIONS

Selon une étude effectuée par Kantar intitulée « The Futures Company for American Express Travel », bien que la technologie occupe une place centrale dans la vie de cette clientèle, elle ne doit toutefois pas remplacer le service personnalisé. En effet, 83 % des milléniaux ont affirmé accorder une grande importance au service personnalisé et sont disposés à ce que les chaînes hôtelières suivent leurs habitudes en échange d’une expérience adaptée à leurs goûts et à leurs attentes.

Comme abordé dans notre article « Les auberges de jeunesse québécoises suivront-elles la tendance européenne ? »¹, l’expérience est au coeur de la renaissance des auberges de jeunesse. En plus d’un produit redéveloppé, les aires communes spacieuses, les événements et les interactions sociales font en sorte que certains clients, bien qu’ayant les moyens de séjourner dans un hôtel haut de gamme, sélectionnent ce type d’hébergement en raison de l’expérience qui lui est rattachée.

On remarque une hausse de popularité pour les espaces communs chez les milléniaux, car ils accordent beaucoup d’importance à la possibilité de partager et d’échanger avec d’autres clients et, d’autre part, à la possibilité de ne pas être confiné à leurs chambres pour travailler.

L’accessibilité, la gratification immédiate et l’authenticité sont également des éléments centraux, alors que les milléniaux sont à la recherche d’hôtels qui reflètent le caractère de la destination ainsi qu’un style de vie. Ils privilégient donc la personnalisation à la standardisation, ce que l’on retrouve habituellement dans les hôtels où on offre une expérience axée sur la culture locale.

Au sujet de cette expérience tant recherchée, les différentes chaînes hôtelières sont en pleine transformation et proposent de plus en plus un produit qui est davantage adapté à cette génération. Notons que la génération des milléniaux composera 75 % de la population active en Amérique du Nord d’ici 10 ans. Il est donc normal que les différentes chaînes veuillent offrir un produit qui reflète les attentes de cette génération.

Ainsi, ces dernières années, on a vu naître plusieurs nouvelles chaînes qui se qualifient comme étant abordables, mais chic, tout en étant design et offrant une expérience. Notons que les tarifs pratiqués dans ces nouvelles marques varient grandement. Par exemple, les Moxy Hotels sont plutôt économiques (Moxy Milan, 59 €), alors que la chaîne Virgin Hotels est plutôt haut de gamme (175 USD).


Moxy Hotel

Lancés en 2013, les Moxy Hotels, de la chaîne Marriott, se définissent comme étant « un luxe abordable ». Ciblant directement les milléniaux, ces établissements offrent des chambres plus petites, mais avec des espaces communs modernes qui incitent les interactions sociales. L’enregistrement se fait en utilisant un téléphone intelligent. On compte actuellement un Moxy Hotel en activité, soit à Milan (Italie), et dix ouvertures sont prévues en 2016.


Hôtels Alt

Photo : © Halt Griffintown

Dans le contexte québécois, notons, la chaîne des Hôtels Alt qui se veut « chic sans artifice », offrant un produit minimaliste tout en étant design et ergonomique, aux services allégés et à un tarif concurrentiel. À titre d’exemple, l’Hôtel Alt Montréal, situé dans Griffintown, est équipé d’espaces créatifs et des séances de yoga y sont organisées régulièrement. Les milléniaux sont ainsi directement ciblés par cette chaîne hôtelière qui se veut branchée, tendance et adaptée à son environnement.


Radisson RED

Le groupe hôtelier Rezidor a introduit en 2015 la chaîne Radisson RED dont la tarification est plus élevée que chez Moxy Hotels. La description vise sans équivoque les milléniaux : « Lifestyle hotels for the millenial mindset ». Cette chaîne fait appel à une clientèle technophile qui désire une expérience de séjour non traditionnelle. Ce nouveau concept allie travail et divertissement et est inspiré par le design, l’art, la musique et la mode. À titre d’exemple, au lieu d’offrir des espaces de réunion traditionnels, les hôtels Radisson RED proposent un studio pour les événements où différentes rencontres peuvent avoir lieu en même temps. Un seul Radisson RED sera en activité à partir d’avril 2016, soit à Bruxelles (Belgique). L’ouverture de 60 établissements est prévue d’ici 2020, dont 17 en Amérique du Nord d’ici 2019.


CitizenM Schiphol

La chaîne citizenM gagne rapidement en popularité avec six établissements en activité à ce jour. La vision de citizenM est de créer « un luxe abordable pour une nouvelle race de voyageurs internationaux qui traversent les continents comme d’autres traversent la rue ».

CitizenM Londres


Virgin Hotel

La marque Virgin Hotels, l’une des composantes du portfolio impressionnant de Virgin, a été lancée en 2010. Au coeur de ses valeurs se trouve une passion pour la restauration, la musique et la culture. Les établissements fusionnent avec le paysage local en fournissant un environnement dynamique et inclusif pour les clients et les gens du coin. Le premier hôtel a ouvert ses portes à Chicago en 2014 et quatre hôtels sont en voie d’ouverture, soit à Nashville, New York, Dallas et New Orleans.

The Funny Library, Virgin Chicago


OUVRIR LA VOIE

Qu’on se le dise : la génération des milléniaux ouvre la voie à la génération Z et les gens les plus âgés de cette génération vont bientôt commencer à travailler et à voyager. Encore plus que les milléniaux, il s’agit de la génération la plus connectée qui soit. Ainsi, préparer l’industrie hôtelière avec la technologie et les expériences tant recherchées devrait être perçu comme un investissement raisonnable à long terme envers les générations à venir.


D’autres chaînes existantes ciblent actuellement les milléniaux, bien que leur offre soit davantage standardisée, dont :

  • Ace Hotels ;
  • Aloft Hotels ;
  • AC Hotels ;
  • Hotel Indigo ;
  • Joie de Vivre Hotels ;
  • Renaissance Hotels ;
  • W Hotels.
  • ¹ Magazine Hôtels, Restaurants & Institutions, printemps 2014. volume 18, numéro 1.
 
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