Le Clarendon fermé pour les fêtes : « On s’endette et ça ne finit pas »
Fermé depuis le 2 octobre dernier, l’Hôtel Clarendon à Québec vient d’annoncer sa décision de ne pas rouvrir pour le temps des fêtes. « On a réagi aux annonces du gouvernement, au fait qu’il n’y aurait aucune restauration jusqu’au 11 janvier prochain. S’il n’y a pas de restaurants, de consommation d’alcool et de nourriture, il n’y aura pas de fête », se désole Michel Côté, copropriétaire de l’hôtel.
La fin d’année représentait habituellement pour le Clarendon beaucoup de célébrations en salles, de nuitées et de bonnes factures en restauration pour les réveillons, soit une partie importante des revenus qui ne sera pas au rendez-vous cette année. « C’est la grosse saison pour nous après l’été, environ 15 % du chiffre d’affaires, indique l’hôtelier. On est en train de souffrir terriblement économiquement. On s’endette et ça finit pas... »
Si la presse parle beaucoup de la situation critique des restaurants en ces temps de pandémie, Michel Côté souligne que le manque à gagner des hôtels est beaucoup plus important. Il évoque les comptes de taxes de 355 000$ par année, l’hypothèque de 35 000$ par mois, les assurances pour une bâtisse qui vaut 18 millions… « C’est pas la même affaire qu’un restaurant ! Nos frais sont colossaux. Le Clarendon est une entreprise québécoise qui a toujours été opérée par des familles ; on n’est pas une multinationale qui va pouvoir compenser les pertes demain. Là on est en train d’utiliser ce qu’on avait mis de côté pour notre retraite pour réussir à sortir la tête de l’eau… »
Un début d’année pessimiste
Michel Côté ne veut pas généraliser la situation des hôteliers : certains, par exemple en Gaspésie, ont connu une très bonne saison, tandis que le Vieux-Québec et le Vieux-Montréal sont vides. « La majorité des Québécois se sont enrichis pendant la pandémie ; moi, comme hôtelier, je me suis endetté et appauvri. Il y a un déséquilibre. » Mais Le propriétaire du Clarendon se défend de critiquer le gouvernement : il est d’accord avec ses décisions de fermer les restaurants - il pense même que les rassemblements ne devraient pas être autorisés pour Noël. « La santé, c’est de la vision à plus long terme, et c’est plus important que nos entreprises. Oui on souffre, mais j’ai une conscience sociale qui me fait dire qu’on n’a pas le choix », lâche l’hôtelier.
Quant à la réouverture, Michel Côté ne s’avance pas et préfère rester prudent, se disant même pessimiste. Car au vu de la situation au Canada, il n’a pas l’impression qu’il sera possible de repartir après les fêtes. « Je ne sais pas combien d’hôtels vont tomber mais c’est certain qu’on passera pas tous à travers, assure le propriétaire du Clarendon. De notre côté, on attend jusqu’au 11 janvier et on avisera à ce moment-là. On est obligés d’agir à la dernière minute parce qu’on n’est pas maîtres de la situation, et ça c’est une souffrance. Comme entrepreneurs, on est habitués à prendre nos décisions ; là, on subit des risques qu’on n’a jamais pris et on n’en voit pas l’issue… »
D’ici la mi-janvier, l’hôtel du Vieux-Québec tente de limiter les dépenses. Après avoir fait la girafe en tentant de garder la tête hors de l’eau, c’est la politique de la tortue : rentrer dans sa carapace et attendre qu’il fasse plus beau pour sortir.
(Crédit photo : Hôtel Clarendon)