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Junior Therriault, le petit prince de Chicago

 
17 août 2020 | Par Pierre-Alain Belpaire

Voici un peu plus de dix ans, en février 2010, HRImag s’intéressait au phénomène Junior Therriault. Derrière ce visage poupon et ce sourire éclatant, notre rédactrice, impressionnée par les premières récompenses glanées et les commentaires louangeurs des enseignants de Mérici, était convaincue que se cachait là un jeune homme « de la trempe de ceux qui sont faits pour cet exigeant métier ».

Les années ont passé, les expériences se sont accumulées et une fine barbichette s’est invitée sur la bouille du jovial cuisinier. Après avoir participé à la World Expo de Shanghaï (« Un point tournant »), avoir aiguisé ses couteaux dans quelques cuisines et s’être vu imposer une longue pause suite à un terrible accident à la main gauche, le dynamique chef débarque dans un Club Med des Caraïbes. Il y rencontre Victoria. Un autre « moment décisif », tant côté privé que sur le plan professionnel.

La demoiselle est originaire de Chicago. Ça tombe bien : le jeune loup a la bougeotte. En 2013, le voilà qui découvre donc la Windy City, un aller simple en poche et, comme toujours, de l’ambition à revendre et une profonde envie d’apprendre, de rencontrer, de s’amuser. Et de réussir.

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Au Millennium Knickerbocker, Junior Therriault délaisse ses chères cuisines, passant des coulisses à la salle. Il gère, il calcule, il planifie. Et il adore ça. Au terme de quatre années dans l’Illinois, ses supérieurs l’envoient au Colorado, au Millennium Harvest House de Boulder. « Une adresse à redresser, résume-t-il. Ça allait du malheureux plongeur abandonné derrière les fourneaux aux burgers servis complètement crus. Tout était à refaire ! Ma première décision fut de fermer les cuisines pour repartir de zéro. » En quelques mois à peine, la mission est accomplie et le voilà donc de retour aux côtés de sa belle sur les rives du Lac Michigan.

Après une année et demie à l’hôtel-boutique Claridge House, Junior Therriault rejoint, à la fin de l’hiver dernier, un autre établissement de la galaxie Oxford Hotels & Resorts, le restaurant About Last Knife (ALK pour les intimes), en qualité de directeur général de cette table réputée de Chicago. Il doit enfiler son nouvel uniforme le 16 mars. « Le jour-même, le gouverneur de l’état décidait de tout fermer », soupire-t-il. Quatre (longs) mois plus tard, alors que l’industrie de la restauration illinoisaise tente de se relever de la terrible crise, le Québécois se retrouve face au défi le plus exigeant de sa jeune carrière. « Le plus excitant aussi, ajoute-t-il. Mais j’aime le risque et l’adrénaline. »

En quelques semaines, le mandat s’est transformé. Alors que Chicago attirait des hordes de touristes venus des quatre coins du globe, que ses restaurants et hôtels enregistraient des taux de fréquentation historiques, le désormais célèbre virus a contraint Junior Therriault à refaire ses devoirs. « Le budget qui existait en mars n’existe plus : si on atteint le break even, ça sera déjà beau, illustre-t-il. En acceptant ce poste, mon objectif principal était d’amener le restaurant encore plus loin, plus haut. Là, mon but, c’est de le faire vivre. » Les heures d’ouverture sont repensées, tout comme le nombre d’employés en salle, au bar et en cuisine et le nombre de places assises disponibles. « On a aussi dû revoir notre marketing : c’est bien beau d’être connu un peu partout dans le monde, mais si les touristes ne sont pas là, il faut focusser sur le local et séduire les gens de Chicago, les convaincre de découvrir leur propre ville. »

Malgré le contexte délicat, Junior Therriault se veut confiant, tant pour son établissement que pour cette métropole qui l’a séduit. « Chicago, c’est une ville de nourriture et de concepts, c’est le NRA Show, c’est le laboratoire des futures tendances. Ce ne sera pas facile, non, mais je suis persuadé que Chicago sera parmi les premières à se relever : il y a ici des passionnés, des acharnés, des gens qui sont prêts à travailler, il y a aussi une belle collaboration entre les différents acteurs de l’industrie. Bref, il y a un amour de la restauration. »

Celui qui, voici dix ans, avouait que la connaissance de la langue de Shakespeare était l’un de ses points faibles répond aujourd’hui aux entrevues avec un accent prononcé et à grands renforts d’anglicismes. Mais même s’il semble évoluer à Chicago comme un poisson dans l’eau, Junior Therriault insiste sur le fait que son épouse et lui-même pourraient découvrir d’autres horizons. Éternel curieux, décrit par les dirigeants du groupe Oxford comme un lifelong learner, le « petit gars de Québec » n’exclut pas devenir un jour enseignant pour transmettre sa passion aux nouvelles générations. Dans les travées du Collège Mérici ? « Pourquoi pas ?, sourit-il. Ce serait beau, non ? J’ai toujours dit que j’aimerais retrouver Mérici. Un jour peut-être. »

(Photo fournie par About Last Knife)

Mots-clés: États-Unis
Nomination
Restauration

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