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Personnalité HRI

24 ans, assez fous, un peu naïfs

 
31 octobre 2017 | Par Pierre-Alain Belpaire

« Nous sommes de vieux chums du secondaire. On était amis bien avant de se lancer dans ce projet. Et on l’est toujours, rassurez-vous ! »

Steve Morency, président de Yuzu Sushi, et Frédéric Matte, vice-président et directeur général du groupe, se connaissent, s’apprécient et, surtout, se complètent parfaitement. « Lui, il veille au développement, tandis que moi, je m’occupe surtout des opérations », précise Frédéric. L’alliance semble particulièrement bien fonctionner puisque la célèbre enseigne orange fêtait, en octobre 2017, son 15e anniversaire.

Retour à Québec, au début des années 2000. Deux jeunes passionnés de restauration s’intéressent à la nourriture asiatique et s’interrogent sur le réel potentiel commercial des sushis. « Dans l’Ouest, on avait pu observer que ce produit était déjà tendance. Un nombre grandissant d’établissements en proposaient aussi à Montréal. Mais à l’époque, à Québec, il ne devait pas y avoir plus de 10 points de vente. Pourtant, on sentait que la capitale était prête. »

Une étude de marché réalisée par Steve, dans le cadre d’un travail d’université, viendra confirmer cette hypothèse. Le dynamique duo n’hésite guère et ouvre, au cœur d’un quartier Saint-Roch prêt à reverdir, le tout premier Yuzu. « On avait 24 ans, on était assez fous, un peu naïfs aussi. Mais cette folie et cette naïveté ne nous ont pas trop mal réussi jusqu’ici, non ? » En « adaptant la cuisine japonaise au goût et aux habitudes des Québécois », les deux entrepreneurs tapent dans le mille. Au fil des ans, tandis que pleuvent les prix et récompenses, les points de vente se multiplient, principalement sur le modèle de la franchise. Le groupe compte, à l’automne 2017, 63 restaurants ayant pignon sur rue et une vingtaine de comptoirs Yuzu sushi express logés dans des IGA. Si Montréal et Québec sont les villes les mieux nanties, la bannière Yuzu est également présente au Saguenay, en Beauce et même au Nouveau-Brunswick.

Les dirigeants du groupe ne souhaitent, bien évidemment, pas s’arrêter en si bon chemin. Des Aliments Yuzu devraient prochainement se trouver sur les tablettes de nombreuses épiceries. Les deux amis avouent également nourrir des désirs d’expansion. « Dans les trois à cinq prochaines années, on aimerait atteindre la barre des 100 restaurants et celle des 100 comptoirs express, glisse Frédéric Matte. Si on tient un rythme de 20 à 25 ouvertures par an, on y parviendra. Cela peut sembler beaucoup mais c’est réaliste. Très réaliste. Nos chiffres de croissance sont bons, la demande est là, on maîtrise parfaitement la situation…Pourquoi ne pas en profiter ? »

S’il se contentera, pour l’heure, d’un terrain de jeu à la grandeur du Québec et des Maritimes, Yuzu Sushi ne ferme pas la porte à l’Ouest, voire aux États-Unis. « On a aujourd’hui suffisamment de projets et de défis dans l’Est du Canada, mais on garde évidemment l’œil ouvert et l’oreille attentive », sourit le copropriétaire.

Persuadé que les sushis ne sont plus aujourd’hui une « simple mode » mais un « véritable mode de vie », Frédéric Matte accepte avec fierté l’étiquette « restauration rapide » accolée à ses établissements. « Regardez nos produits, observez l’esthétique des plateaux, la qualité de nos sushis… C’est du rapide, oui, mais du haut de gamme. Du fast good food. Et c’est clairement cette tendance qui va s’imposer dans les prochaines années. On a juste pris quelques longueurs d’avance. »

 
 
Point de vue

#encuisineaussi

 
31 octobre 2017 | Par Robert Dion

La sordide affaire Harvey Weinstein aura amené des milliers de femmes (et d’hommes !) à dénoncer les comportements inacceptables subis sur leur lieu de travail. L’industrie de la restauration n’est bien évidemment pas épargnée par ces gestes aussi déplacés que condamnables. Récemment, une jeune chef originaire de Trois-Rivières contactait d’ailleurs notre rédaction pour évoquer un « véritable fléau » et dresser la liste des sombres épisodes qu’elle avait vécus : remarques déplacées, réflexions à caractère sexuel, blagues de mononcle, voire même main aux fesses !

S’il ne faut bien évidemment pas tomber dans le sensationnalisme et les condamnations pressées, ne nous voilons pas la face : le harcèlement, qu’il soit sexuel ou moral, et les pressions sont fréquents dans les cuisines. Mais j’aime imaginer que ces pratiques tendent à disparaître (bien trop lentement, malheureusement). La raison tient en trois points : rareté de la main-d’œuvre, modernisation des relations de travail et impact des réseaux sociaux.

Auparavant, la hiérarchie en cuisine était une question de hauteur de toque, de prestige, d’influence. De pouvoir. Aujourd’hui, le respect entre les différents postes, l’esprit de partage et la notion de famille sont bien plus présents. Surtout, la tolérance zéro s’est invitée derrière les fourneaux. Et c’est tant mieux.

Robert Dion, éditeur
[email protected]

 
 
Billet de la rédaction

Les héros ordinaires

 
31 octobre 2017 | Par Pierre-Alain Belpaire

Saviez-vous que la pâtissière Daphné Héroux, petit bout de femme originaire de Saint-Hubert, avait brillamment représenté le Canada au récent Mondial des Métiers d’Abu Dhabi ? Connaissez-vous Christopher Dea, jeune chef au talent incontestable et à la maturité incroyable, qui vient d’ouvrir son propre restaurant à Chandler à seulement 21 ans ? Et Marie-Hélène Audet, cette cuisinière gaspésienne qui, après s’être promis de cuisiner local dans son CPE, vient de publier un recueil de recettes inspirantes destinées aux institutions et aux jeunes parents ? Avez-vous entendu parler des Québécois Carl Villeneuve Lepage et Pier-Alexis Soulière, qui ont fini respectivement premier et deuxième lors de l’édition 2017 du Meilleur Sommelier du Canada ?

L’industrie des HRI fait face à de nombreux défis. Entre révolution technologique et pénurie de main-d’œuvre, entre débat sur le salaire minimum et fermetures précoces de restaurants, les sujets lourds, austères et techniques ne manquent pas. Il est, évidemment, de notre devoir d’en parler. De vous présenter des solutions concrètes. D’analyser les chiffres et statistiques. Nous le faisons et continuerons à le faire.

Mais en acceptant le poste de rédacteur en chef, je me suis promis, je me suis juré de parler, tant sur notre site que dans nos pages, de ceux qui, au quotidien, vivent leur passion à 100%. De ces jeunes prêts à traverser les océans pour suer durant quelques semaines dans les cuisines du Noma ou de Paul Bocuse. De ces professeurs qui tentent, avec les moyens du bord, d’améliorer la formation offerte dans leurs écoles. De ces « petits » hôteliers obligés de se réinventer pour contrer le tout-puissant Airbnb. D’une sœur Angèle toujours aussi passionnée ou d’un Chef Thémis toujours aussi allumé. De ces héros ordinaires qui, j’en suis persuadé, font rêver les restaurateurs et hôteliers de demain.

Pierre-Alain Belpaire, rédacteur en chef
[email protected]

 
 
Aliments/menus/recettes

Étonnantes tomates

 
31 octobre 2017 | Par Marie-Pier Boucher

ELLE ENTRE DANS LA COMPOSITION DES SALADES, DES SANDWICHS ET DES HAMBURGERS. ELLE AMÈNE FRAÎCHEUR ET COULEUR. ELLE PEUT ÊTRE DÉVORÉE CRUE OU PASSER PAR L’ÉTAPE CUISSON. AUSSI INDISPENSABLE QU’INÉVITABLE, LA TOMATE N’EN RESTE PAS MOINS UN PRODUIT ENCORE LARGEMENT MÉCONNU. UNE ÉTUDE MENÉE AUX ÉTATS-UNIS EN 2008 DÉMONTRAIT QUE 99,8 % DES RESTAURATEURS SE CONTENTAIENT D’UNE À TROIS VARIÉTÉS DE CE FRUIT-LÉGUME, DONT IL EXISTE POURTANT PLUSIEURS MILLIERS DE SORTES !

QUELLES TOMATES UTILISER POUR QUELLE PRÉPARATION ? COMMENT LES CONSERVER SANS ALTÉRER LEURS QUALITÉS GUSTATIVES ? FAUT-IL OPTER POUR DES TOMATES DE CHAMP OU DE SERRE ? CELLE QUI S’INVITE DÉSORMAIS À LONGUEUR D’ANNÉE DANS NOS ASSIETTES ET NOS CUISINES MÉRITE BIEN QUE L’ON SE POSE DAVANTAGE DE QUESTIONS À SON SUJET.

TOMATE LOCALE ET FAUSSE REPRÉSENTATION
Ces dernières années, les tomates locales, savoureuses et colorées ont la cote chez les restaurateurs. L’exemple de La Cage – Brasserie sportive illustre bien cette nouvelle vague. Agacé par le manque de fraîcheur des tomates qu’il recevait de la Floride, le chef Louis-François Marcotte a tout bonnement cessé d’importer ce fruit rouge pour commander des tomates de serre québécoises. « Ce choix nous permet d’avoir de belles tomates d’ici, selon un volume constant toute l’année », fait-il savoir. Et puisque La Cage compte une cinquantaine de restaurants dans la province, elle a l’avantage de conclure des ententes annuelles « sur le prix au volume » tout en profitant de tomates de meilleure qualité.

Toutefois, « pour des raisons d’éclairage, les tomates de serre ne sont jamais aussi bonnes que les tomates de champ », soutient le sélectionneur Michel Lachaume, qui cultive de rares variétés de fruits et de légumes au sein d’un jardin expérimental appartenant à Hector Larivée. En saison, mieux vaut donc encourager les producteurs locaux.

À l’inverse, les tomates industrielles font fureur auprès des chaînes de restauration rapide, principalement parce qu’elles ne sont ni chères ni juteuses. Cueillies avant maturité (justement pour ne pas contenir de jus – ce qui imbiberait le pain des sandwichs et des burgers), ces tomates sont condamnées à ne pas être savoureuses. « C’est toute une industrie basée sur le transport et l’absence de perte, bref sur l’efficacité au mépris du goût », souligne le passionné de jardinage.

Profitant du manque de connaissances des consommateurs (et de certains restaurateurs), l’industrie alimentaire produit aussi des tomates faussement ancestrales à partir de tomates hybrides. Avec leur look imparfait et leurs couleurs variées, elles ressemblent comme deux gouttes d’eau aux véritables tomates anciennes et sont vendues comme telles. La tromperie passe inaperçue auprès du grand public, et même des producteurs, dont l’expertise variétale est trop souvent restreinte. D’ailleurs, « croire qu’une tomate est meilleure parce que sa variété est ancienne est un mythe. Sa saveur est liée à sa génétique et non pas à son ancienneté », clarifie l’expert. Par contre, les tomates ancestrales sont réellement plus productives. C’est la raison pour laquelle plusieurs nouvelles variétés de tomates sont créées à partir d’une ancienne génétique tant savoureuse que productive

DES TOMATES DANS L’ASSIETTE DÉJEUNER
Fruit au même titre que le melon, la fraise et la banane, la tomate est désormais un incontournable de l’assiette du petit-déjeuner, et sa popularité ne cesse de prendre de l’ampleur. À tel point que la chaîne de restaurants Chez Cora a modifié sa carte en conséquence. « Depuis juin, notre nouveau menu offre l’option tomates. Certains de nos clients mentionnent aux serveuses qu’ils ne veulent ni fruits, ni patates, mais uniquement des tomates. Nous n’avions pas ce genre de demandes auparavant. Les clients étaient contents d’avoir des fruits dans leur assiette », confie Luc Dalla Colletta, propriétaire de deux restaurants Chez Cora.

C’est toutefois pour des raisons d’ordre économique que le chef propriétaire du Buffet de l’Antiquaire de Québec, Gilles Boulet, a choisi de garnir ses assiettes déjeuner de tomates. « Ça me coûte beaucoup moins cher de mettre deux tranches de tomates avec un peu de laitue que des tranches de fruits. Par contre, mes clients les veulent vraiment, leurs tranches de tomate ! Plusieurs en demandent en supplément », révèle-t-il.

Quelques restaurateurs remplacent parfois les fruits par des tomates afin d’écouler celles qui ont été coupées la veille et ainsi d’éviter les pertes. Voilà une façon comme une autre de contrer le gaspillage alimentaire !

Couleurs et conservation
Ce n’est pas parce qu’elles sont vertes que les tomates ne sont pas mûres. De délicieuses variétés telles que la Green Zebra et la Green Doctor’s Frosted en témoignent. De son côté, la tomate noire est extrêmement savoureuse. Riche d’une génétique de toutes les couleurs, sa chair est à la fois rose, rouge et vert foncé. Justement, les chefs raffolent particulièrement de la Belle du Collège, une variété de tomate noire que Michel Lachaume a conçue en collaboration avec Tom Wagner, le plus grand créateur de variétés de tomates au monde. Quant à la tomate orange, elle contient considérablement plus d’antioxydants que la tomate rouge. « Il faudrait manger 800 tomates rouges pour obtenir les bienfaits santé d’une tomate orange », précise Michel Lachaume, qui propose de déguster l’Amana, la Kali et la Kellogg’s Breakfast.

Peu importe la couleur et la variété, les tomates ne doivent pas être entreposées au réfrigérateur. Pour développer les composés volatils qui contribuent à leur saveur, elles doivent préférablement être conservées à température ambiante (environ 20 °C). De cette manière, leur conservation peut durer de 14 à 21 jours. Au contraire, lorsqu’elles sont au frais (4 °C), elles peuvent perdre jusqu’aux deux tiers de leurs composés volatils, ce qui détériore leur texture et leur saveur. Enfin, la conservation d’une tomate dépend de son degré Brix : plus un plant de tomates est en santé, plus ses fruits sont sucrés, et meilleure est leur conservation. Le type de sol ainsi que l’ensoleillement jouent donc un rôle important.

À chaque plat, sa variété
Essentielle à la préparation d’une majorité de plats, la tomate est un fruit à la penderie bien garnie ! Populaire pour sa belle robe rouge, la tomate peut en effet aussi revêtir sa chair de rose, de jaune, d’orange, de noir et de vert. Reine de la diversité, elle se décline en plusieurs variétés et sous différentes formes qui peuvent magnifier un plat... ou le desservir totalement.

  • CUISSON ET SAUCES
    Les tomates italiennes sont idéales pour les sauces et tous les autres plats nécessitant une cuisson. Le sélectionneur Michel Lachaume recommande de privilégier les variétés patrimoniales, dont la Napoli, une savoureuse variante de la Roma. En saison, il est conseillé d’en congeler afin d’en avoir à portée de main durant le reste de l’année : une sauce cuisinée avec des tomates congelées sera nettement plus fraîche que celle qui est à base de tomates en conserve. « À la congélation, les cellules des tomates explosent, ce qui leur fait perdre l’eau qu’elles contiennent. À la cuisson, l’eau de ces tomates congelées n’a donc pas besoin d’être évaporée. C’est ce processus qui donne un goût frais à la sauce », indique l’expert.

Si vous n’avez accès qu’à des tomates ordinaires, retirez les graines et le gel qu’elles renferment, car l’acidité se loge dans ces parties du fruit, alors que le sucre est concentré dans la chair. Ce faisant, nul besoin d’ajouter du sucre pour couper l’amertume.

  • SOUPES ET CRÈMES
    La classique soupe « Tomates, poulet et riz » s’apprête avec des tomates ordinaires, desquelles il n’est pas nécessaire d’extraire le gel puisque son acidité sera atténuée par les autres ingrédients et qu’il ajoutera de la saveur. Pour la préparation d’une crème de tomates, favorisez les tomates italiennes, dont la chair épaisse apportera de la texture.
  • SALADES
    Offertes en multiples couleurs, les tomates cerises sont les chouchous des chefs pour composer des salades. En plus d’enjoliver la présentation des assiettes, leurs saveurs sont singulières. Le coup de cœur du sélectionneur est l’Isis Candy, une variété de tomate cerise exceptionnelle en raison de ses trois stades de développement qui lui confèrent trois saveurs différentes : elle est d’abord jaune, puis des teintes rosées apparaissent pour la rendre bicolore, avant qu’elle ne devienne complètement rose. « Il est possible de faire une salade de tomates cerises colorées uniquement avec cette variété », fait-il remarquer.

-SANDWICHS
La tomate la plus appropriée pour couper de belles tranches à insérer dans les sandwichs et les burgers est sans contredit la Beefsteak.

 
 
Vaisselle

Le bois s’invite à la table

 
31 octobre 2017 | Par Catherine Maisonneuve

ON L’AVAIT PRESQUE OUBLIÉ. POURTANT, LE BOIS, LONGTEMPS JUGÉ RUSTIQUE ET DÉPASSÉ, FAIT SON GRAND RETOUR SUR LES TABLES ET COMPTOIRS DE NOS RESTAURANTS. ON SE SOUVIENT ÉVIDEMMENT DE LA MODE « CHALET CHIC », QUI EN A FAIT LA PRINCIPALE MATIÈRE ASSOCIÉE À CETTE TENDANCE. SON USAGE FUT ALORS SI EXCESSIF QU’IL EST RAPIDEMENT DEVENU BANAL. CE MATÉRIAU FAIT POURTANT UN MAGNIFIQUE RETOUR DANS NOS CUISINES, REMIS AU GOÛT DU JOUR. POURQUOI ? PARCE QUE LE STYLE MINIMALISTE N’A JAMAIS ÉTÉ AUSSI À LA MODE, ET ÉGALEMENT PARCE QUE LE RETOUR AUX MATIÈRES PREMIÈRES SIMPLES EST PLUS EN DEMANDE QUE JAMAIS. DE PLUS, LA FINESSE ET LA BEAUTÉ NATURELLE DU BOIS CONVIENNENT PARFAITEMENT AU STYLE ÉPURÉ DE BEAUX OBJETS QUE L’ON VEUT PRATIQUES, MAIS STYLISÉS.

« LE BOIS, ON VA SE LE DIRE, C’EST PLUS CHALEUREUX QUE LE STAINLESS, CONFIE THANIA GOYETTE, PROPRIÉTAIRE DU RESTAURANT LE PIED BLEU À QUÉBEC, QUI PRÉSENTE LA PARTICULARITÉ DE COMPTER DEUX ÉBÉNISTES DANS SON ÉQUIPE DE CUISINE ! C’EST PLUS RUSTIQUE ET ON L’ASSOCIE INSTINCTIVEMENT AUX REPAS EN FAMILLE, À LA CONVIVIALITÉ, À LA SIMPLICITÉ. »

Planches en bois : la créativité n’a plus de limites
Qui pense « bois », pense « planches à découper » et « planches de service ». Les restaurants spécialisés en charcuterie utilisaient beaucoup cette matière pour confectionner leurs plats de service, et ce, bien avant que cela ne devienne tendance. On en trouve différents modèles sur le marché : planches à découper classiques, planches avec gouttières ou stabilisateurs, de forme rectangulaire, ronde, ovale, avec ou sans poignée... Elles sont offertes en plusieurs essences. Noyer, cerisier et érable figurent parmi les plus populaires.

Le choix des matériaux est évidemment important. L’érable et le cerisier viennent en tête de liste pour leur dureté, leur rigidité et leur épaisseur, lorsqu’on fabrique une planche de bois. Le noyer est plutôt retenu pour son aspect esthétique, à cause de sa coloration brun foncé. Il est également possible de mélanger les essences pour obtenir des planches « multicolores » au design audacieux. Matériau malléable et adaptable, le bois peut en outre être scié, peint, percé, traité, poli, ciré et verni. La seule limite ? Votre créativité.

La nouvelle tendance : le format individuel
Les bols faits entièrement en bois ne sont désormais plus réservés aux plats de service ou aux salades. On les voit de plus en plus en format miniature pour servir les condiments, les épices ou les accompagnements. On en trouve en formats individuels, de formes et de couleurs variées.

Les bols en bois sont souvent enduits d’huile de table – et non vernis – après leur fabrication. On obtient alors une surface légèrement mate. L’utilisation d’huile permet également qu’aucun vernis ne se détache du bol et ne vienne se mélanger avec les aliments. Les conseils d’entretien sont semblables pour tous les accessoires de cuisine en bois : on suggère de nettoyer avec une éponge douce, de l’eau tiède et du savon, puis de sécher. Il ne faut pas mettre le bois dans le lave-vaisselle ni l’immerger complètement dans l’eau.

Les avantages du bois
Le bois est d’abord apprécié pour son côté chaleureux. Il confère un côté cozy et convivial à une cuisine. C’est un matériau qui vieillit bien et qui se révèle facile d’entretien. Il est important de se rappeler que le bois est presque impossible à casser, contrairement à la porcelaine et aux matériaux similaires. Il est réparable : une petite fissure ou une marque de couteau sur une planche en bois sont de légers accidents corrigibles, ce qui est assez rare lorsqu’on parle d’accessoires de cuisine. Le stainless et la porcelaine ne pardonnent pas...

L’entretien des accessoires en bois est simple, mais il faut connaître la marche à suivre. Le bois se nettoie avec de l’eau et du savon, mais il ne faut jamais immerger la pièce en bois complètement dans l’eau (encore moins la mettre au lave- vaisselle). Pour effacer les marques de couteau (sur une planche à découper, par exemple), il suffit de poncer la surface avec du papier sablé et d’appliquer par la suite sur la surface propre une huile conçue spécialement pour cet usage. L’utilisation finale d’un chiffon permettra de garder la surface sèche.

 
 
Hôtellerie

Des partenariats tentants mais Ô combien risqués

 
31 octobre 2017 | Par Sébastien Gagné

DANS UN MONDE OÙ LE TRANSPORT AÉRIEN FACILITE LES DÉPLACEMENTS, LA MONDIALISATION N’EST PLUS UN CONCEPT VAGUE ET LOINTAIN. CHAQUE JOUR, LES DESTINATIONS TOURISTIQUES SE FONT CONCURRENCE POUR ACCUEILLIR LES GRANDS CONGRÈS INTERNATIONAUX, ET LA COMPÉTITION SE TROUVE PARFOIS À DES MILLIERS DE KILOMÈTRES DE NOUS. CETTE COMPÉTITIVITÉ ACCRUE ET INTERNATIONALE POUSSE TOUS LES SECTEURS DU TOURISME À SE DÉPASSER ET À MAINTENIR LES PRIX AU PLUS BAS. L’HÔTELLERIE N’ÉCHAPPE PAS À CETTE PRESSION DU MARCHÉ. COMME NOTRE PLUS IMPORTANTE DÉPENSE SE SITUE SUR LE PLAN DES RESSOURCES HUMAINES, IL EST NATUREL DE VOULOIR CONTRÔLER AU MAXIMUM SES COÛTS EN MAIN-D’ŒUVRE. DEPUIS UNE VINGTAINE D’ANNÉES, LES HÔTELIERS ONT AINSI ESSAYÉ PLUSIEURS AVENUES POUR LIMITER L’AUGMENTATION DES SALAIRES : NÉGOCIATIONS COLLECTIVES ARDUES (ÉCHELLES SALARIALES, ASSURANCES COLLECTIVES, FONDS DE PENSION, ETC.), HÔTELS À SERVICE LIMITÉ, FERMETURE DE SERVICES ET, FINALEMENT, SOUS-TRAITANCE.

À première vue, la sous-traitance semble être un remède à bien des maux. Elle s’est insérée lentement dans nos mœurs d’aubergistes. Les cuisines de plusieurs grands hôtels, poussées par un coût en salaires croissant et une rareté de main-d’œuvre, ont amorcé le processus en s’approvisionnant en pâtisseries auprès de fournisseurs externes et, ultérieurement, en fermant complètement ce service. Rapidement, c’est toute l’industrie qui s’est alignée sur cette façon de fonctionner. Il y a 15 ou 20 ans, il était pratiquement impossible de trouver un dessert maison dans nos hôtels. Plusieurs conventions collectives ont été amendées pour faire disparaître les classifications liées à la pâtisserie. Comme peu de salariés étaient visés par ces demandes patronales, les syndicats ont, en général, accepté ce changement de pratique.

Par la suite, les hôteliers ont confié à des tiers la plupart des travaux de cuisine de préproduction (parage des légumes, fonds de sauces, boucherie, bases de soupes, etc.). Sournoisement, nos cuisines se sont mises à se ressembler étrangement : le nombre de fournisseurs étant limité, plusieurs hôtels ont fini par servir les mêmes assiettes ! De plus, la réduction des tâches a diminué les effectifs en cuisine, et il est devenu difficile de produire rapidement ou de s’adapter à un achalandage en dents de scie. Les syndicats ont, de leur côté, commencé à fermer la porte à l’impartition. Il n’en fallait pas plus pour que plusieurs songent à louer leurs locaux de préparation de nourriture et de boissons à des restaurateurs externes. Les premiers hôtels « multiopérateurs » étaient nés ! Les premiers établissements qui ont décidé de sous-traiter leur service de restauration ont vanté les mérites du processus sur plusieurs tribunes. À la fin des années 1990, j’occupais le poste de directeur des restaurants dans un hôtel de Montréal. J’avais tellement de difficulté à gérer mes équipes et à contribuer positivement au profit de l’entreprise que j’enviais les établissements qui sous-traitaient ce service. Jeune et naïf, je me trouvais à scier la branche sur laquelle j’étais assis.

J’ai ensuite travaillé dans un établissement dont tous les services de restauration et de bar étaient confiés à des tiers. Le réveil fut brutal ! La dissociation complète des services d’hébergement et de restauration ne se fait pas sans heurts. Par exemple, des clients se plaignaient du bruit émis par le bar jusqu’aux petites heures du matin. Après avoir géré la plainte, je ne pouvais que demander gentiment à l’opérateur du bar d’essayer de baisser le volume à partir de minuit le soir suivant. Il me répondait qu’il était malheureusement impossible de le faire puisque « sa » clientèle aimait l’ambiance survoltée de « son » bar et que « ses » ventes en souffriraient. Nous avions créé deux entreprises en une... La même chose se produisait du côté de la salle à manger. Les clients de l’hôtel n’intéressaient pas vraiment le gestionnaire du restaurant. Celui-ci n’avait jamais cuisiné de petits-déjeuners dans ses autres établissements et il trouvait vraiment pénible de faire fonctionner son restaurant durant les trois services. Souvent, les portes de la salle à manger restaient fermées au petit déjeuner, le personnel ne s’étant pas présenté au travail. Comme hôtelier, je n’avais pas d’autre choix que de dédommager les clients insatisfaits. Les commentaires que nous recevions étaient très durs à l’endroit des services de restauration rendus par nos « partenaires », et nous ne pouvions aucunement nous en dissocier.

D’un point de vue de gestion, la sous-traitance soulage l’hôtelier de certaines tâches : embauche, formation, achats, inventaire, etc. Autre point non négligeable : la rentabilité à court terme de l’hôtel est meilleure. Par contre, pour avoir discuté de mon expérience avec plusieurs collègues, le fait de ne pas être entièrement maître chez soi rend l’opération hôtelière très problématique. Souvent, la vision et la mission des entreprises qui évoluent côte à côte sont diamétralement opposées. À quelques exceptions près, les clients ignorent qu’il y a sous-traitance, et l’hôtelier doit accepter les blâmes liés aux services rendus par un autre entrepreneur.

La tendance à la sous-traitance s’est accélérée au cours des 10 dernières années. Les investisseurs ont rapidement compris que l’unique façon d’éliminer la gestion des relations de travail en milieu syndiqué était de confier l’administration du personnel à des tiers. Plusieurs firmes se sont spécialisées en soutien à la gestion de l’hébergement. Ainsi, la restauration n’était plus seule à être déléguée à un sous-traitant. On a vu débarquer des services d’entretien ménager externes et même le comptoir de réception être occupé par l’équipe d’une autre entreprise. Certains établissements affichant plusieurs centaines de chambres ne comptent qu’une vingtaine d’employés.Le reste du personnel est rémunéré par des firmes externes.

Qu’avons-nous gagné en faisant ce virage majeur ? Une gestion des ressources humaines facilitée, une masse salariale gérée de façon plus serrée et, surtout, une profitabilité plus stable et augmentée. Cependant, n’est-il pas important de se demander si cette transformation majeure a préservé l’âme de nos établissements ? Comment des employés de trois ou quatre sociétés différentes cohabitant dans le même établissement peuvent-ils partager la même fierté ou le même sentiment d’appartenance ? Seuls les hôtels détenant une personnalité ou une culture assez forte pourront créer l’illusion d’un tout. La fluidité entre les divers servicespeut certes être développée et maintenue, mais cela nécessite une supervision constante. Les contrats de sous-traitance doivent aussi être examinés de près par l’hôtelier.

Dans un monde où l’expérience authentique est essentielle, notre clientèle nous suivra-t-elle dans cette métamorphose ? Plusieurs hôtels ont déjà amorcé la marche arrière. Certaines cuisines ont commencé à préparer de nouveau elles-mêmes leurs desserts, et les produits maison sont de plus en plus monnaie courante dans nos restaurants d’hôtel. Certains hôteliers ont même repris les fonctions laissées vacantes par des sous-traitants. Comme dans le cas de toutes les grandes tendances, nous sommes peut-être allés un peu trop
loin, et le balancier retrouve tranquillement son équilibre. Il ne faut surtout pas oublier que notre client international voyage dans des destinations où la sous-traitance n’est pas la norme et où l’hôtellerie classique est toujours de mise. Pouvons-nous être concurrentiels tant sur le plan de l’expérience-client que du point de vue financier ? C’est peut-être là notre plus important défi des prochaines années.

 
 
Dossier

Pour des menus pleins de bons « sans »

 
31 octobre 2017 | Par Sophie Suraniti

SANS COLORANT ARTIFICIEL, SANS GRAS TRANS, SANS NOIX, SANS SUCRE, SANS GLUTEN, SANS PROTÉINES D’ORIGINE ANIMALE… ANNÉE APRÈS ANNÉE, LA LISTE DES « SANS » S’ALLONGE. CHIMIQUE, ALLERGIQUE, DIÉTÉTIQUE, ÉTHIQUE : SI ELLE SEMBLE SANS FIN POUR LES RESTAURATEURS, ELLE N’EST PAS SANS FAIM POUR LES CLIENTS !

LA PERCEPTION DU « SANS » : COMBINER PLAISIR ET RESTRICTION, PAS FACILE !
Voilà des informations et des explications qui ne sont pas évidentes à communiquer. Le « sans » signifie la plupart du temps qu’on a enlevé quelque chose à un aliment ou à une préparation. Or, dès que l’on soustrait, cela sonne négatif. D’autant plus que « les gens mènent une double vie alimentaire : celle à la maison étant souvent très différente de celle du restaurant, où l’on se relâche davantage. On y mange plus gras, plus sucré… », remarque Bernard Boutboul, directeur général de Gira Conseil, un cabinet spécialiste du marché de la consommation alimentaire hors domicile en France. Avec le « sans », nous combinons perception négative et aspect privatif. Une visite au restaurant doit pourtant rester pour le client un synonyme de plaisir, de générosité et de partage.

MARKETER LES « SANS » AU RESTAURANT
Communiquer positivement à partir de notions restrictives relève du défi ! Le fait qu’il existe au sein de l’établissement un contexte procédural destiné à répondre aux restrictions alimentaires du client ne doit pas gâcher l’expérience de ce dernier. Il faut que cela se fasse le plus simplement et naturellement possible. En informant, en montrant, en expliquant.

AFFICHER
Cela va du simple affichage au sein de l’établissement (affichette sur la porte d’entrée ou sur les tables) jusqu’à l’information communiquée via les réseaux sociaux, en passant par la présence de petits logos sur les menus. On retrouve les logos classiques : un épi de blé barré pour indiquer que tel plat ne contient pas de gluten ; une coche verte (avec ou sans feuille à l’extrémité du V) pour dire qu’il s’agit d’un plat végétarien ; le même logo complété de la mention « végane », etc. Certains établissements vont plus loin que ces représentations courantes. Pour cela, ils font généralement appel à des graphistes ou à des agences spécialisées en création de pictogrammes parfois drôles, toujours esthétiques. Communiquer sur les « sans » peut être synonyme de créativité et de gaieté !

GUIDER
Dès qu’un client ayant des besoins particuliers franchit la porte de l’établissement et en avertit le personnel en salle, l’information doit être transmise en cuisine. Par exemple, on réserve des grillepains pour les produits boulangers sans gluten si un client a mentionné une allergie. Certains établissements ont un guide des allergènes. Le serveur apporte le guide au client si celui-ci en fait la demande. Il peut alors prendre connaissance des allergènes présents dans un plat. Bien entendu, le restaurateur se couvre toujours en précisant qu’il ne peut garantir un environnement de préparation entièrement exempt d’allergènes. Il y a notamment des procédures à suivre pour éviter les contaminations croisées ; par exemple, les surfaces de travail et les ustensiles sont soigneusement nettoyés avant toute manipulation des aliments et préparation des plats. Certains établissements vont jusqu’à utiliser des codes de couleur.

ÉCHANGER
Cela doit se faire avec doigté et discrétion, car le client ayant des besoins particuliers ne doit pas avoir l’impression d’être un extraterrestre ; pris en charge, oui, mais surtout pas mis à l’écart ! Souvent, la mise en relation et les échanges entre l’établissement et le client se font en amont via les plateformes de communication comme les réseaux sociaux (le bon vieux téléphone marche toujours aussi bien !). L’établissement publicise un nouveau plat ou un nouveau menu, et le client en profite alors pour poser une série de questions. Pour lui, c’est une façon de préparer sa visite, de se mettre en confiance. D’où l’importance de faire le suivi, à savoir de répondre aux questions du client ! Quels sont les plats véganes ? Quelles sont les valeurs nutritives du menu brunch ? Geneviève Nadeau, chef et directrice de l’alimentation aux restaurants Pacini, reçoit régulièrement des courriels de personnes lui demandant ce qu’elles peuvent manger selon leur profil ou préférences alimentaires. Pour cette nutritionniste de formation qui voit à l’élaboration des recettes, qui a proposé l’installation d’auto-injecteurs d’épinéphrine dans les restaurants Pacini et qui a participé à l’élaboration des guides d’allergènes de l’enseigne, il faut montrer aux clients ayant un souci face au gluten, au sodium ou aux gras trans « qu’on a cette petite attention en leur proposant des plats qui correspondent à leurs besoins spécifiques ».Ces clients ne doivent pas ressentir de malaise lorsqu’ils ouvrent le menu.

CELA PASSE AUSSI PAR LA DÉCORATION ET L’AMBIANCE
Le marketing des produits « sans » en restauration, ce ne sont pas que des images, des abrégés, des logos ou une information bien agencés sur support papier ou orchestrés sur les plateformes numériques. On le retrouve désormais dans le choix du décor et l’atmosphère de certains établissements, ceux dont le concept vise directement des clientèles à l’alimentation particulière. [2] L’accent est alors mis sur le végétal, la nature, un environnement apaisant. L’aspect « santé » et toutes les déclinaisons de « sans » ne sont alors plus associés aux ambiances aseptisées, froides et cliniques qui ont prévalu par le passé. Aujourd’hui, c’est tout le contraire. On joue de plus en plus sur le bien-être, sur l’effet positif que cela procure de vivre « sans ». Les ambiances à la californienne dont s’inspirent plusieurs établissements actuels en sont un bel exemple.

POUR LE MOMENT, UNE CLIENTÈLE ENCORE DISCRÈTE
« La majorité des clients de Pacini ne recherchent pas le “sans”. Ceux qui ont
des demandes précises représentent de 1 % à 2 % des clients. Il s’agit donc pour le moment d’une clientèle restreinte », explique Andréanne Charbonneau, directrice, marketing et relations publiques, de l’enseigne québécoise. La chaîne de restaurants à l’italienne a toutefois revu ses menus au fil des ans pour réduire le sel dans ses recettes, éliminer les gras trans artificiels et, plus récemment, proposer des plats sans gluten et sans allergènes. Pour le plat de pâtes sans allergènes (sans noix, arachides, lait, œufs, poissons ou fruits de
mer), c’est un fournisseur extérieur – Les Aliments Ange-Gardien – qui s’en charge dans sa propre usine. La nutritionniste Geneviève Nadeau explore d’ailleurs actuellement des façons de rendre ce plat sans allergènes ni gluten. Car certains clients souhaitent un repas complètement « sans » !

LA SITUATION POURRAIT CHANGER…
Devant l’émergence des clientèles végétalienne et végane, les restaurateurs font face à de nouvelles questions ou demandes. Après le « sans gluten », voici en effet l’ère du végétal. Il faut savoir y répondre ! Mais selon Bernard Boutboul de Gira Conseil, la catégorie de clients à ne pas négliger ou oublier est celle qui se dit flexitarienne. Parce qu’il n’y a pas que les alimentations particulières qui sont en croissance. Il y a aussi les alimentations particulières occasionnelles. Par choix, par goût, par envie, par curiosité, ces personnes s’offrent de temps à autre un menu « sans ». Les mangeurs « sans » forment ainsi une vaste identité alimentaire dont il faut tenir compte. Ce sont de nouvelles convictions, obligations ou modes alimentaires auxquelles les restaurateurs doivent répondre, sous peine de rater le coche.

MARKETER, SANS DIVISER
« De plus en plus de chaînes végétaliennes ou sans allergènes ouvrent. Ce sont des restaurants qui vont chercher une clientèle spécifique. Amener les gens à des spécificités alimentaires m’inquiète, car le message que l’on veut répandre autour de la bonne alimentation, c’est avant tout l’équilibre, le plaisir, le fait d’être dans une relation saine avec les aliments, ses émotions… », confie Geneviève Nadeau. Et également d’être en relation avec les autres ! Aussi, face à toutes ces alimentations particulières, trois grands risques se présentent pour les restaurateurs : on divise les mangeurs ; on entretient la cacophonie alimentaire ambiante ; on repart sur une catégorisation simpliste des aliments. À la place des bons aliments versus les mauvais aliments, nous avons maintenant les « avec » et les « sans » ! Même si le marketing des plats « sans » y va encore par tâtonnements à l’heure actuelle, les établissements doivent garder le cap sur les notions de plaisir, de partage et de convivialité. Les restaurateurs ont donc tout intérêt à valoriser d’autres aspects comme l’ambiance, le beau, la générosité ou le travail de leurs fournisseurs. Car c’est ce que recherche avant tout le client. On peut être « sans », mais pas dépourvu de goût !

 
 
Les défis de...

Paies et rémunérations : Halte à l’improvisation !

 
31 octobre 2017 | Par Pierre-Alain Belpaire

Christopher Dea n’a que 21 ans mais un aplomb à faire pâlir d’envie nombre de chefs expérimentés. En mai dernier, le jeune prodige décidait de voler de ses propres ailes et inaugurait L’Attablé dans le décor enchanteur de sa ville natale, Chandler. Si les menus concoctés par le créatif garçon ont rapidement convaincu les plus suspicieux, certains observateurs soufflaient qu’il devrait, en plus de puiser dans son talent derrière les fourneaux, démontrer de réelles aptitudes en gestion et en administration. « Ça ne m’a jamais fait peur, sourit le principal intéressé. Je me concentre sur ce que je fais de mieux. Et pour le reste, j’apprends… ou je délègue. Ainsi, tout ce qui concerne les paies et la comptabilité, c’est mon père qui s’en charge. Et lui-même a été briefé par une comptable professionnelle. »

Cette décision des plus matures pourrait bien aider le jeune Gaspésien dans les prochains mois. Car s’il constitue rarement la priorité des restaurateurs et hôteliers fraîchement installés, le dossier salarial n’en reste pas moins inévitable – et ô combien complexe !

Tables d’impôt, congés de maladie, indemnités de vacances… Dans le dossier des paies, les règles sont nombreuses, les calculs permanents, les termes pointus. « On ne peut se permettre la moindre improvisation », prévient Karine Boisvert, responsable des ressources humaines au groupe GenCaM.  [4]

Exercice compliqué et répétitif, la production de la paie a pourtant été simplifiée au fil des ans grâce à l’utilisation de divers logiciels. Mais aussi intéressantes et efficaces soient-elles, ces technologies n’ont pas annulé les risques d’erreur. Encore aujourd’hui, la plus petite des méprises peut avoir de (très) lourdes conséquences, tant pour l’employeur que pour les membres de son personnel. « Les poursuites et amendes possibles peuvent s’avérer particulièrement coûteuses », affirme François Pageau, professeur à l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec. Prudence, donc !

Interne ou externe ?
Les professionnels de la restauration et de l’hôtellerie doivent, en matière de paie et de salaire, effectuer un choix épineux : vont-ils traiter ce dossier en interne ou confier cette délicate mission à un expert extérieur à leur entreprise ? « Dans l’univers québécois des HRI, je dirais que c’est du 50/50, estime François Pageau. L’avantage de procéder en interne, c’est le prix, évidemment, et l’aspect confidentiel. Par contre, l’avantage de le faire à l’externe, c’est la rapidité, l’absence attendue d’erreurs et l’automatisation du processus. Prenez donc bien le temps d’y réfléchir. »

Nombre d’entrepreneurs en démarrage ou de dirigeants de « petites » équipes opteront sans doute pour une gestion interne du service de paie. « Certains logiciels modernes, particulièrement simples d’utilisation, gèrent tout de A à Z, mentionne Vincent Arsenault, propriétaire du Tomate Basilic (Saint-Léonard), membre du CA de l’ARQ et enseignant à l’ITHQ. Les tables d’impôt, par exemple, y sont automatiquement mises à jour. »

Les plus gros joueurs semblent préférer se tourner vers des fournisseurs de services externes, comme la Banque Nationale ou Desjardins. « Nous, on gère quatre hôtels et un restaurant, soit un total de plus de 200 employés, illustre Karine Boisvert, de GenCaM. Faire appel à un service externe nous assure un gain de temps considérable et nous enlève une certaine pression. On prépare l’info, on entre les données mais tout le reste — les calculs, les T4, etc. – nous est apporté sur un plateau d’argent. » La gestionnaire ne nie cependant pas que ces services extérieurs aient un coût pour l’employeur. Elle précise toutefois que cet investissement peut rapidement s’avérer rentable. « Si vous estimez que le jeu en vaut la chandelle, n’hésitez pas une seconde. »

Qu’ils effectuent eux-mêmes calculs et transactions ou qu’ils en confient la responsabilité à des tiers, les responsables d’établissements hôteliers et de restauration doivent bien évidemment se tenir au courant des lois, règlements et décrets en matière salariale et, surtout, des nombreuses modifications et mises à jour. Gare à ceux qui omettraient de se garder informés !

« On note à ce sujet une grande différence entre l’hôtellerie et la restauration, souligne François Pageau. Dans le premier univers, la présence de responsables de ressources humaines est fréquente ; tout est généralement bien structuré et organisé. Par contre, hormis dans les groupes d’envergure ou les chaînes, on trouve rarement un gestionnaire RH dans un restaurant. Cela peut poser problème si la personne en charge d’une embauche ou de la signature d’un contrat n’est pas au courant des dernières modifications en matière de paie. »

Si elle demande concentration, rigueur et sérieux, la gestion des salaires exige aussi de l’employeur une bonne dose de transparence et de pédagogie. Car si le dossier semble complexe pour les uns, il l’est, évidemment, tout autant pour les autres. « Lorsque les employés reçoivent leurs talons de paie, combien prennent le temps de le consulter ? Combien le comprennent entièrement ? », s’interroge Karine Boisvert. Quelques minutes d’explications et de dialogue pourraient probablement éclaircir bien des choses et éviter bien des mystères…

To do or not to do ?
Pour affronter le défi de la paie, le gestionnaire d’un restaurant ou d’un hôtel doit donc se tenir informé des lois et décrets, mais également de traditions parfois moins « officielles ». HRImag fait le point sur trois dossiers courants, voire brûlants.

NÉGOCIATIONS
Aller voir son supérieur et se lancer dans d’intenses discussions pour obtenir l’augmentation tant espérée… Nombre d’employés en rêvent, mais sont-ils nombreux à oser franchir le pas ? « Depuis quatre ou cinq ans, c’est un phénomène grandissant, surtout en cuisine, estime Vincent Arsenault. Dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre où les employés sont avantagés par rapport à leur employeur, les négociations sont de plus en plus courantes. » Certains professionnels soulignent toutefois que la pénurie actuelle n’explique pas tout. Ils pointent deux autres critères : le lieu de travail et l’âge du personnel. « Les négociations sont plus rares dans nos hôtels du Centre du Québec qu’à Québec ou à Lévis, où le coût de la vie est plus élevé, constate ainsi Karine Boisvert. Les jeunes de la nouvelle génération semblent également avoir plus d’audace, moins de gêne. »

Si la Loi sur les normes du travail ne garantit pas un droit de négociation salariale à l’employé, la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) stipule que, « dans la mesure où le salaire minimum est respecté, rien n’empêche les parties de négocier le salaire annuel, en cours de contrat, et ce, autant à la hausse qu’à la baisse ». « Tant pis pour celui qui ne tente pas sa chance… », résume François Pageau.

POURBOIRES
Le chapitre « Pourboires » vient, à lui seul, compliquer encore un peu plus un dossier salarial déjà particulièrement complexe et technique ! Outre l’ajout de calculs qu’il implique, ce volet suscite débats et discussions, tensions et comparaisons.

Sur le plan des pourboires, les employeurs doivent respecter une certaine distance et agir avec prudence. L’article 50 de la Loi sur les normes du travail leur interdit en effet d’imposer le partage des pourboires entre leurs salariés ou d’instaurer une politique en la matière. L’Association des restaurateurs du Québec (ARQ) appelle d’ailleurs de ses vœux une refonte de la législation « afin de redonner aux employeurs leur pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne la politique de partage des pourboires ». Dans l’édition automnale 2017 du HRImag, François Meunier, vice-président aux affaires publiques et gouvernementales de l’ARQ, regrettait un « déséquilibre entre la salle et la cuisine » et soulignait que « l’employeur devrait être en mesure de décider à qui et dans quelles proportions le pourboire peut être réparti ». « La politique de rémunération appartient au propriétaire, au responsable de l’établissement,
ajoute Vincent Arsenault. Le pourboire faisant partie de la rémunération, il devrait pouvoir intervenir et participer à ce débat au sein de son restaurant ou de son hôtel. À mes yeux, l’article 50 n’a plus de raison d’être. »

ÉQUITÉ
Égalité ou équité ? La différence est mince, mais sa compréhension est essentielle. « L’égalité salariale a pour objectif de verser un salaire égal pour des emplois semblables, rappelle la CNESST. Le principe de l’équité salariale va plus loin, puisqu’il exige un salaire égal pour un travail différent mais équivalent. »

Au Québec, un écart de 11,4 % s’observe encore aujourd’hui entre les salaires horaires moyens des hommes et des femmes. Dans le but de s’assurer que, pour une tâche de valeur équivalente, les dames touchent autant que ces messieurs, la Loi sur l’équité salariale prévoit que tout employeur dont l’entreprise compte au moins 10 salariés réalise un « exercice initial d’équité salariale ». « L’employeur doit procéder à l’évaluation des emplois de son entreprise afin de comparer les emplois féminins aux emplois masculins. C’est en évaluant les emplois, sans biais sexistes, qu’on élimine la discrimination systémique », souligne la CNESST. Si, au terme de cet exercice, l’employeur constate des écarts de salaire entre postes féminins et masculins de même valeur, « il doit verser des ajustements salariaux aux titulaires des emplois féminins ».

C’est malheureusement dans l’industrie des HRI que cet exercice est le plus fréquemment « oublié ». En date du 30 juin dernier, près d’un employeur sur six ne l’avait pas réalisé. La CNESST rappelle que des vérifications et des contrôles peuvent être effectués « de façon aléatoire ». Et gare aux contrevenants : les manquements à la Loi sur l’équité salariale peuvent mener à des amendes de plusieurs milliers de dollars.

 
 
Statistiques

Des chiffres qui parlent

 
31 octobre 2017 | Par François Pageau

LES VENTES EN RESTAURATION REPARTENT (ENFIN) À LA HAUSSE

SELON LE PROFIL DE PERFORMANCE 2017 DIFFUSÉ PAR L’ARQ ET BASÉ SUR DES DONNÉES DE STATISTIQUE CANADA, LES « VENTES ANNUELLES BRUTES EN RESTAURATION » AU QUÉBEC ONT CRÛ DE 870 MILLIONS DE DOLLARS EN 2016 PAR RAPPORT À 2015. LES VENTES ANNUELLES RÉELLES (INFLATION EN MOINS) ONT QUANT À ELLES CRÛ DE 480 MILLIONS.

CONSTAT
L’industrie de la restauration profite d’un regain important en 2016 et reprend donc la voie de la croissance de manière très marquée, après sept années de stagnation en ventes réelles. Cette hausse est le résultat de l’augmentation des prix des menus et de la croissance de la demande.

Cette croissance marquée des ventes brutes s’explique par des augmentations combinées des prix (inflation des menus), soit de 420 millions de dollars sur les 870 millions de croissance totale, et de la demande de 450 millions sur les mêmes 870 millions de croissance totale de 2015 à 2016. Cette demande accrue est d’autant plus importante que le nombre total d’établissements de restauration est à la baisse ou en stagnation, selon les régions de la province. La dernière hausse significative de la demande (ventes réelles) datait de 2010.

Cette demande accrue devrait signifier une augmentation de la clientèle et/ou de la facture moyenne, s’ajoutant à la hausse des prix exercée sur les menus des restaurants du Québec. Cette embellie est de bon augure … si la tendance se maintient.

Il restera maintenant à analyser ces chiffres pour dresser la liste des facteurs qui ont favorisé la hausse de la demande. Cette augmentation est en tout cas à mettre en lien avec les excellents résultats enregistrés par l’industrie du tourisme et la croissance économique observée à l’échelle provinciale.

LE SALAIRE MINIMUM À 15 $ : INOFFENSIF À SEATTLE
UNE ÉTUDE PUBLIÉE EN JUIN 2017 PAR LE CENTER ON WAGE AND EMPLOYMENT DYNAMICS (CWED) DÉMONTRE QUE LES HAUSSES DU SALAIRE MINIMUM PLANIFIÉES DÈS 2014 DANS LA VILLE DE SEATTLE EN VUE D’ATTEINDRE 15 $ L’HEURE N’ONT EU AUCUN IMPACT SUR LE NOMBRE D’EMPLOIS, MAIS ONT, CEPENDANT, PERMIS DE HAUSSER LE SALAIRE MOYEN. BIEN QUE L’ÉTUDE EXTRAPOLE À L’ENSEMBLE DES SECTEURS ÉCONOMIQUES, L’ÉCHANTILLON D’ENTREPRISES ÉTAIT CONSTITUÉ DE RESTAURANTS, PUISQUE CEUXCI EMPLOIENT LA PLUS GRANDE PROPORTION DES PERSONNES PAYÉES AU SALAIRE MINIMUM.

CONSTAT
Selon les auteurs, l’augmentation du salaire minimum représente un stimulant pour l’industrie : les employés qui bénéficient d’une hausse dépensent davantage dans les restaurants. Leur productivité et leur motivation au travail augmentent également. Il faut toutefois préciser que la hausse du salaire minimum vers les 15 $ se fera progressivement jusqu’en 2021 et différemment selon la taille des entreprises et les avantages sociaux offerts aux employés. De plus, certains types de restaurants de l’État de Washington ont droit à un crédit d’impôt (1 $ en 2015 et 2 $ en 2016) pour compenser les coûts supplémentaires liés aux pourboires des employés de service, et ce, tant que le taux n’aura pas atteint 15 $/heure. Les conclusions de l’étude du CWED portent sur les hausses effectuées jusqu’en 2016.

Les conclusions de l’étude des chercheurs (Sylvia A. Allegretto et Michael Reich) démontrent que, contrairement aux prévisions économiques courantes, les hausses appliquées au salaire horaire minimum en vue d’atteindre 15 $ n’ont pas eu d’effets négatifs sur les emplois comme tels. Comparativement à un groupe témoin, certaines catégories de restaurants de Seattle ont même fait preuve de plus de vigueur sur le plan de la création d’emplois, notamment dans les restaurants à service complet et les services alimentaires. L’étude a par contre souligné que le taux d’emplois créés dans les chaînes de restauration à service limité avait enregistré une croissance plus basse qu’au sein du groupe témoin. À ce titre, plusieurs études antérieures du CWED établissaient aussi des effets nuls des hausses du salaire minimum sur l’emploi en général.

Autres conclusions ? Les salaires ont connu des hausses variables selon les types de restaurants. Ainsi, sans surprise, les restaurants à service limité ont affiché des hausses de salaire de plus de 10 %, tandis que les autres catégories (notamment les restaurants à service complet) ont connu des hausses moindres. Ces augmentations étaient par contre nulles dans les services alimentaires. L’influence du 15 $/heure sur les salaires payés varie donc selon le type de restaurants. Certains rémunéraient déjà leurs employés au-delà du salaire minimum et n’ont pas été touchés par les hausses prescrites.

 
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