brightness_4
 

LE COMMERCE DE L’ALIMENTATION ET DE LA RESTAURATION ALIMENTAIRE

Les 36 cordes sensibles des Québécois appliquées au secteur de la restauration alimentaire

 
2 avril 2011 | Par Christian Latour | Chasseur de connaissances | Mérici Collégial Privé

LES 36 CORDES SENSIBLES DES QUÉBÉCOIS (une analyse de l’identité sociale des Québécois francophones basée sur leurs habitudes de consommation) [1]

Depuis sa parution en 1978, cet ouvrage a servi de guide et a donné le ton à toute l’industrie publicitaire québécoise.

Cet ouvrage de référence du sociologue et publicitaire québécois Jacques Bouchard (1930-2006) contient des informations qui nous aident à comprendre les comportements des consommateurs québécois, mais également les comportements des employés québécois, des fournisseurs québécois, des partenaires financiers québécois, et, etc.

Cet ouvrage de Jacques Bouchard contient, à mon avis, des connaissances fondamentales pour toute personne qui opère ou envisage d’exploiter une entreprise de restauration alimentaire au Québec.


CE QU’IL FAUT ABSOLUMENT SAVOIR CONCERNANT LES QUÉBÉCOIS FRANCOPHONES

Nous sommes « uniques », aucun autre peuple au monde ne possède le même bagage génétique. Nous sommes la conséquence de notre environnement singulier et de nos 400 ans d’histoire. Selon Jacques Bouchard, il résulte de cet assemblage particulier une structure identitaire spécifique qui nous caractérise et influence aussi bien nos décisions d’achat que l’ensemble de nos comportements (les émissions que nous regardons à la télévision, nos lectures, nos voyages, les hôtels, et les restaurants que nous fréquentons, et, etc.).

Notre structure identitaire est composée de 6 racines et de 36 cordes sensibles et c’est à partir de cette structure identitaire que nous pouvons commencer à dresser le portrait type des Québécois francophones.


LES 6 RACINES ET 36 CORDES SENSIBLES DES QUÉBÉCOIS :

NOTRE RACINE TERRIENNE très profonde

1. Le bon sens
2. L’amour de la nature
3. La simplicité
4. La fidélité au patrimoine
5. La finasserie
6. L’habileté manuelle

NOTRE RACINE MINORITAIRE

7. Le mercantilisme
8. L’envie
9. La tolérance
10. Le matriarcat
11. Le potinage
12. La surconsommation

NOTRE RACINE NORD-AMÉRICAINE

13. La recherche du confort
14. Le goût bizarre
15. La solidarité continentale
16. La bosse des technologies
17. Le sens de la publicité
18. L’entrepreneuriat

NOTRE RACINE CATHOLIQUE

19. Le scepticisme
20. L’esprit moutonnier
21. Le fatalisme
22. Le conservatisme
23. L’Hédonisme
24. La joie de vivre

NOTRE RACINE LATINE

25. L’amour des enfants
26. Le besoin de paraître
27. Le talent artistique
28. La sentimentalité
29. L’instinctivité
30. Le chauvinisme

NOTRE RACINE FRANÇAISE

31. Le cartésianisme
32. L’individualisme
33. La sensualité
34. La vantardise
35. La tergiversation
36. Les « nationalismes »

Que nous soyons restaurateurs, clients, employés, fournisseurs, etc. notre structure identitaire spécifique nous influence. Elle détermine nos us et coutumes. Elle se concrétise expressément dans l’ensemble de nos choix et comportements sociaux.

Pour en savoir encore un peu plus sur les Québécois francophones, je vous propose d’explorer dans les lignes qui suivent nos 6 racines et 36 cordes sensibles.


NOTRE RACINE TERRIENNE

Nous sommes tous à quelques générations près, des filles et fils de la terre, des « habitants ». À cause de cette racine, nous avons une affinité particulière pour la cuisine du terroir. Pour nous cette cuisine est pleine de bon sens puisqu’elle prend les produits dans nos champs, dans nos bois, dans nos jardins et même dans nos eaux et elle les amène jusqu’à dans notre assiette.

De notre racine terrienne nous avons hérité de 6 cordes sensibles :

Corde sensible numéro 1 – nous priorisons le Gros Bon Sens

Balzac définit le bon sens comme « la solide intelligence des gens simples ». Par exemple les fraises au Québec ça se mange l’été, pas l’hiver. Ce qui vient de la terre est bon pour la santé. Le vin, ça vient de la terre donc c’est bon pour la santé. Un restaurant où l’on peut apporter notre vin, quelle bonne idée !

C’est à cause de cette corde sensible que le consommateur québécois se dit à lui même « si je paye une bouteille de vin à la SAQ 15 $, alors pourquoi devrais je payer 45 $ pour la même bouteille au restaurant ? Pourquoi devrais-je payer en plus 6,75 $ de pourboire au serveur qui va passer environ 5 minutes pour me l’apporter et l’ouvrir ? Et en plus pourquoi devrais-je payer un autre 6,25 $ au gouvernement pour la taxe, simplement parce que je consomme ce vin au restaurant plutôt qu’à la maison ? »

Corde sensible numéro 2 – nous aimons la nature et les animaux

L’appel de la campagne, des grands espaces et du terroir, ça fait partie de nos gènes. « Ils aiment la chasse, la navigation et les voyages », constatait l’intendant Hocquart au début de la colonie.

C’est à cause de cette corde sensible qu’on voit arriver sur le marché des restaurants avec des noms comme Restaurant Ô Chalet, Le Club Chasse et Pêche, Restaurant Panache, Restaurant Le Filet, également des livres de recettes avec des titres tels que : Comme au Chalet de Laurent Godbout. Notre amour de la nature se manifeste également dans les décors et objets de décoration que nous privilégions.

Corde sensible numéro 3 – nous sommes des gens simples qui recherchent la simplicité

Au Québec, on dit « pourquoi faire compliquer quand on peut faire simple ? ».

Malgré le tapage médiatique que l’on fait autour de la cuisine moléculaire et des nombreux restaurants qui essaient d’offrir ce type de cuisine très « glamour ». Il n’en demeure pas moins qu’actuellement la grande majorité des consommateurs réclame une bouffe réconfortante, simple, saine, vraie, identifiable, accessible, une bouffe qu’ils sont capables de comprendre, de reconnaître. Le pâté chinois est devenu, depuis 2007, notre plat national et nous en sommes fiers, parce que nous aimons ce plat simple qui nous rappelle notre enfance.

Pour les consommateurs, vouloir la simplicité c’est aussi, malgré ce que pensent plusieurs cuisiniers et restaurateurs, vouloir la simplicité dans l’appellation des plats. Les consommateurs veulent comprendre ce qui est écrit dans le menu. Ils en ont assez des appellations ronflantes qu’ils ne sont pas capables de retenir et qui, dans les faits, ne leur apportent rien de plus. À cause de cette corde sensible, les phrases ésotériques pour décrire les plats sont à éviter.

Ce que les consommateurs désirent dans leur assiette c’est de l’abondance, de la générosité et de la couleur. Ils recherchent très fortement la dimension plaisir lorsqu’ils se donnent la peine de se déplacer jusqu’au restaurant. Ils veulent sortir de leur quotidien, sans qu’il y ait ni complication, ni danger.

De très bons exemples de restaurant faisant appel à cette corde sensible ont ouvert leurs portes récemment : Bar F, Brasserie T !, Cabine M, SSS.

C’est également à cause de cette corde sensible qu’on voit arriver sur le marché des restaurants avec des noms comme Le Hangar, et des livres de recettes avec des titres tels que : Simple et Chic de Louis François Marcotte.

Corde sensible numéro 4 – nous aimons notre passé… et notre patrimoine

Depuis quelques années, les Québécois voyagent de plus en plus dans leur province. La ville de Québec, avec ses 400 ans d’histoire, est devenue pour nous l’espace touristique par excellence. Notre devise, je me souviens, explique pas mal de chose.

C’est à cause de cette corde sensible qu’on voit des restaurants avec des noms comme Aux Anciens Canadiens.

Le retour de nos classiques d’antan et du « comfort food » sur les cartes fait aussi écho à ce trait de caractère des Québécois.

Corde sensible numéro 5 – nous sommes des fins finauds

Nous sommes les champions canadiens de l’absentéisme avec rémunération. Payer en argent pour sauver les taxes, dépasser les limites de vitesse, sans nous faire prendre, passer sur les lumières jaunes (orange), faire des stops sans arrêt, manger la bouffe du patron sans la payer, etc., voilà autant de pratique normale pour un grand nombre de Québécois. Bizarrement dans la tête des Québécois, « déjouer » le méchant système ou les riches patrons ce n’est pas faire preuve de malhonnêteté. Finasser avec le ministère du Revenu est une pratique normale pour un Québécois [2]. Le ministère du Revenu prétend même que les restaurateurs sont de ceux « qui font le plus “d’oublis” dans leurs rapports d’impôt… »

C’est à cause de cette corde sensible que régulièrement des restaurateurs doivent offrir des compensations à des clients, pour se faire pardonner d’avoir apparemment perdu des réservations qui en réalité n’ont jamais été faites par les clients. Les fins finauds le savent très bien… les clients ont toujours raison.

Corde sensible numéro 6 – nous sommes habiles manuellement

Le système « D » nous vient naturellement de notre nature terrienne. Nous sommes des bricoleurs naturels. Selon Jacques Bouchard « c’est dans nos gènes : nous savons quoi faire de nos dix doigts, comme si nos mains étaient des outils. » Nous sommes, à cause de notre héritage terrien, des super « patenteux ».

C’est cette corde sensible qui fait que nous passons notre vie à rénover, à décorer et à (RE)décorer, nos appartements ou nos maisons. En conséquence, c’est également cette corde sensible qui nous amène à visiter des restaurants parfois plus pour leurs décors que pour ce qu’on y mange. Les restaurants, c’est comme des vitrines dans lesquelles on peut entrer pour voir de proche des aménagements et des décors originaux. On peut emprunter dans les restaurants plusieurs bonnes idées, avec simplement l’intention de s’en servir un jour ou l’autre lors d’une prochaine rénovation.


NOTRE RACINE MINORITAIRE

Nous sommes minoritaires, dans le Canada, en Amérique du Nord, dans le Monde. Pendant longtemps, à cause de cette racine, nous avons entretenu un complexe d’infériorité. Maintenant, à cause de cette même racine, nous avons développé un complexe de supériorité.

De notre racine de minoritaire nous avons hérité de 6 cordes sensibles :

Corde sensible numéro 7 – le mercantilisme fait maintenant partie de notre vie

Bel et bien fini, le bas de laine. Fini le paralysant anti mercantilisme qui a marqué notre histoire. Désormais, l’argent triomphe au Québec. Nous ne sommes pas nés pour un petit pain. Nous aimons le profit. Comme les juifs, nous avons compris qu’avec de l’or et de l’argent, la minorité l’emporte.

« Les journaux multiplient les cahiers financiers, de nouveaux magazines apparaissent dans les kiosques, les stations de télévision renseignent régulièrement les auditeurs à l’affût de nouvelles financières. Quebecor a lancé avec succès sa chaîne spécialisée “Argent”. Cette chaîne spécialisée parle de profit et d’argent 24 heures par jour ».

Selon Jacques Bouchard, le nombre d’entreprises détenues par des intérêts locaux est plus élevé au Québec qu’ailleurs au Canada. Depuis 1978, le nombre de millionnaires québécois a plus que centuplé. Une bonne centaine de nos entreprises se sont internationalisées. Certaines (comme le Cirque du Soleil) se sont même hissées parmi les meilleures au monde.

Corde sensible numéro 8 – l’envie nous caractérise

Arthur Buis écrivait il y a deux siècles : « Les Canadiens français se mangent entre eux et ont l’habitude de se décrier dans les livres, les journaux, les discours et les conversations ». Pour Félix Leclerc « Le plaisir de l’un, c’est de voir l’autre se casser le cou ». Ça fait partie de notre nature de chercher : les défauts de Céline, les faiblesses de René, les vices de Guy Laliberté.

L’envie est en fait une réaction causée par l’ombrage que nous fait le succès d’autrui. Nous ne voulons pas posséder la même chose que l’autre, il y a trop de sacrifice à faire. Nous préférons plutôt voir l’autre perdre ce qu’il possède, la tâche est beaucoup plus facile ainsi. Au Québec, pour avoir la paix et être heureux, il vaut mieux ne pas trop faire étalage de votre succès.

À cet effet, on dit souvent qu’il n’y a pas pire qu’un restaurateur québécois pour dénigrer un autre restaurateur québécois.

Corde sensible numéro 9 – nous faisons preuve de tolérance extrême

La tolérance signifie être capable de supporter, avec indulgence, avec patience, parfois même indifférence, ce qui pourrait être contraire à nos valeurs, à notre façon de voir et de penser. Pour résumer cette corde sensible… y a-t-il quelques choses que nous ne tolérons pas au Québec ?

Corde sensible numéro 10 – la société québécoise est une société matriarcale

Louis Franquet écrivait en 1752 : « les femmes québécoises sont souvent plus instruites que les hommes, elles l’emportent sur eux pour l’esprit et elles en ont toutes beaucoup. Elles sont même, d’une façon générale, plus intelligentes que leurs maris. Elles contrôlent les naissances tant pour la consanguinité que pour le nombre de bouches à nourrir. »

Georges Vattier à peu près à la même époque écrivait « Où l’intelligence des Canadiennes française apparaît encore, c’est bien dans leur esprit pratique, leur aptitude aux affaires : elles sont bien des descendantes des Normandes dont on connaît la capacité en ce qui concerne les questions d’argent et les questions légales. Les gens de la campagne n’entreprennent et ne concluent rien de quelque conséquence sans leur avis et leur approbation. Beaucoup de femmes de négociants [directement ou indirectement] gouvernent les affaires de leur mari. »

Les statistiques sont formelles et les faits parlent d’eux-mêmes : la présence des femmes sur le marché du travail n’a cessé de croitre. Sur le plan de la scolarisation, les femmes constituent maintenant la majorité de l’effectif du niveau secondaire, collégial et universitaire. L’effectif féminin serait majoritaire dans la plupart des facultés, y compris celles dites masculines, comme les sciences de l’administration et l’architecture. Les femmes vivent également plus longtemps que les hommes. Elles détiendraient selon Jacques Bouchard plus des deux tiers du patrimoine monétaire québécois. Il y a, selon Statistique Canada, plus de femmes que d’hommes au Québec. Il y a maintenant plus de femmes internautes au Québec que d’homme. Bref, l’influence des femmes québécoise est incontestable, elle augmente et elle continuera d’augmenter au cours des prochaines années.

Un publicitaire dont j’oublie le nom avec beaucoup d’humour a dit à peu près ceci : « y parait que les femmes prennent maintenant 80 % des décisions en matière de consommation. Je me demande bien qui prend l’autre 20 % des décisions, car chez moi ce n’est pas moi. » Ce qui est certain en tout cas c’est qu’en matière de restauration et d’alimentation les femmes québécoises sont vraiment toutes puissantes. Elles décident directement ou indirectement de presque tout. Pour réussir en restauration, vous n’avez aucun choix, vous devez conquérir les femmes, sinon tan pis pour vous.

Corde sensible numéro 11 – nous aimons le potinage

Au Québec : les roches parlent, les murs ont des oreilles. Tout ici finit par se savoir. Les Québécois et les Québécoises ont toujours un secret à raconter. On est six millions, faut s’parler, proclamait une publicité des années 1970.

Le plus puissant des médiums de masse a été pendant longtemps, la corde à linge. Celle-ci a été remplacée par le téléphone portable et maintenant le web. Le principe est toutefois resté le même, le Tam Tam de la tribu est rarement en mode pause. « Tout le monde en parle », au Québec nous donnons facilement dans la rumeur et la légende urbaine. Parle, parle, jase, jase, nous sommes les maîtres incontestés du bouche à oreille.

Les points de contact amis et famille (avec un taux d’influence de 55 %) et professionnels et spécialistes (avec un taux d’influence de 43 %), dépassent largement (en matière d’influence) l’ensemble des médias. Le bouche à oreille est actuellement au Québec, sans contredit, le « moyen » d’influence le plus efficace (voir : http://www.hrimag.com/spip.php?article5385)

Corde sensible numéro 12 – la surconsommation fait partie de notre vie

Au Québec, nous ne consommons pas pour satisfaire nos besoins, nous surconsommons pour le simple plaisir de consommer. Comme Sophocle le disait : « La vie la plus agréable est celle qui se passe sans aucune espèce de sagesse ». Un ménage québécois sur 2 dépense plus qu’il ne gagne. Pour la majorité des Québécois l’équation est simple « vaut mieux en profiter aujourd’hui, on s’ra peut-être pas là demain ». Mangeons, buvons, réjouissons-nous... l’avenir est incertain... surtout, n’attendons pas demain.


NOTRE RACINE NORD-AMÉRICAINE

Des liens, très étroits, nous relies aux Américains. Il y a un grand nombre de Québécois qui pensent même que nous sommes plus américains que canadiens.

De notre racine Nord-Américaine nous avons hérité de 6 cordes sensibles :

Corde sensible numéro 13 – nous sommes constamment à la recherche du confort

Comme le dit si bien Jacques Bouchard, « le Québécois tient absolument au confort de ses fesses ». Nous voulons vivre confortablement en toute sécurité. Nous dépensons donc beaucoup d’énergie et surtout beaucoup d’argent pour y arriver. Nous sommes très poly sensorielle.

Comme l’a expliquée Faith Popcorn, nous voulons vivre dans un cocon maison, travailler dans un cocon bureau, manger dans un cocon resto, nous divertir dans un cocon-bar et finalement nous évader les fins de semaine dans des cocons-hôtels. Les cocons-hôtels et les cocons-restaurants doivent donc être aménagés pour devenir des cocons lieux : de confort, de sécurité, de divertissement.

Corde sensible numéro 14 – nous avons des goûts bizarres

Ce qui est certain, c’est que le goût bizarre ce n’est pas une affaire de revenu. Voici quelques exemples de notre bizarrerie : les décorations de Noël que certains gardent toute l’année, les baignoires renversées recouvertes de plâtres défraichis qui servent de grotte pour des statues de la Sainte Vierge, les pneus bronzés, argentés ou vernis, qui décorent certaines clôtures, les flamants roses, les nains de jardin, les clôtures en bouchon de bière et maintenant en bouchon de liège (bouteille de vin), les sièges d’auto sur les galeries de campagne, etc. Je suis en train d’oublier les cheveux : vert, bleu, rose ou mauve de certains jeunes Québécois.

Corde sensible numéro 15 – nous faisons preuve de solidarité continentale

Puisque l’ALENA, nous permet de partager le continent avec les Américains et les Mexicains, aussi bien démontrer notre solidarité. Pour plusieurs Québécois, nous aimons voyager en Floride et au Mexique le plus souvent possible.

Corde sensible numéro 16 – nous avons la bosse des technologies

Avec le Cirque du Soleil, les Québécois sont entrés, comme des enragés, dans la révolution technologue. Les Québécois ont révolutionné le monde du Cirque grâce à la bosse technologique. Selon Jacques Bouchard, les spectacles du Cirque du Soleil sont de la pure technologie transformée en art. D’après Barbey d’Aurevilly, il ne pourrait en être autrement, le Cirque est le seul spectacle où précision et perfection sont absolument obligatoires au risque d’en mourir.

Corde sensible numéro 17 – nous aimons et avons le sens de la publicité

Les consommateurs québécois ont toujours aimé la publicité, s’amusant même à parodier les messages télévisés, à reprendre des slogans connus, à en détourner le sens juste pour s’amuser. La publicité est considérée par les Québécois comme un art populaire et accessible. On va même au cinéma, pour y voir des montages des meilleures pubs du monde. Tout le monde le sait, on regarde le Super Bowl plus pour la pub que pour le football.

Corde sensible numéro 18 – l’entrepreneuriat est inscrit dans notre code génétique

Dans chaque Québécois ou presque, il y a un entrepreneur qui sommeille. On dit aussi que dans chaque Québécois il y a un restaurateur en attente.


NOTRE RACINE CATHOLIQUE

Malgré le déclin apparent de notre ferveur religieuse, nous restons catholiques par tradition et par culture. Globalement, nous sommes des catholiques imprégnés. Cette imprégnation se manifeste dans notre recherche d’absolu, dans notre façon déductive de raisonner, dans notre penchant pour les structures hiérarchiques, dans notre attitude manichéenne et surtout dans notre panoplie extrêmement riche de jurons religieux.

Une très grande majorité de Québécois (9 sur 10 selon Jacques Bouchard) continuent d’affirmer aux sondeurs qu’ils sont catholiques. En fait, nous croyons tout simplement qu’il est moins risqué de prier Dieu s’il n’existe pas que de ne pas le prier s’il existe. L’appétit du sacré reste dans les faits très présent chez nous.

De notre racine catholique, nous avons hérité de 6 cordes sensibles :

Corde sensible numéro 19 — nous faisons preuve de scepticisme

Depuis la fin de la Révolution tranquille, le scepticisme n’a cessé de régner au Québec. Nous avons développé, une tournure d’esprit qui est faite d’incrédulité systématique. Selon les observateurs, notre scepticisme se confond souvent avec un cynisme qui tourne tout en dérision. Comme le disait Montaigne « Quand on rit de tout, plus rien ne nous dérange. »

Corde sensible numéro 20 — nous avons l’esprit moutonnier

Nous suivons souvent les autres sans réfléchir. Les Québécois se retrouvent souvent : dans les mêmes copropriétés de Miami, les mêmes hôtels au Mexique ou à Paris, sur les mêmes plages du Maine, dans les mêmes parcs à roulottes, et donc dans les mêmes restaurants à la mode. Au Québec, une mode prend très peu de temps avant de gagner la masse. Les Québécois vont là ou il y a du monde. Ils fréquentent toujours les endroits les plus fréquentés. Selon Jacques Bouchard, il s’agit de notre travers le plus populaire, celui que les caricaturistes exploitent le plus, celui que l’on fustige ouvertement dans les conversations, des plus banales aux plus sérieuses.

Corde sensible numéro 21 — nous croyons au fatalisme

Voici une phrase que nous connaissons tous et qui démontre très bien notre propension au fatalisme, « Quand t’es né pour un petit pain tu dois te contenter d’un petit pain ». Ce fatalisme s’incruste en empruntant des formes renouvelées. Par exemple, si nous demandons aujourd’hui à un Québécois « comment ça va ? » Nous pouvons obtenir comme réponse : « Pas pire », « Ça pourrait aller mieux, mais ça coûterait plus cher », « Comme ci, comme ça », « Ça s’endure », « On mange 3 fois par jour ». Pour les Québécois « c’est écrit dans le ciel, plus ça change plus c’est pareil ». Nous devons accepter les choses telles quelles sont, le destin c’est le destin.

Corde sensible numéro 22 — nous faisons preuve de conservatisme

Les Québécois ont une très forte tendance à refuser tout changement, à vouloir maintenir un univers identique à celui qui existe. La majorité des gens recherchent la sécurité et elle se trouve d’ordinaire dans ce qu’ils connaissent déjà.

À cause de cette corde sensible, il y a plusieurs « bons restaurants » qui disparaissent avant d’avoir eu la visite de la majorité des gens. La majorité des gens (environ 60 %) ne sont pas portés vers le changement ; ils sont satisfaits avec les restaurants qu’ils fréquentent déjà. Changer d’établissement les oblige à s’adapter à des nouvelles personnes et des nouvelles façons de faire, etc. La plupart des gens (environ 80 % de la population c.-à-d. la majorité environ 60 % et ceux qui n’ont aucun intérêt pour les restaurants environ 20 %), contrairement à ce qu’on pourrait penser, ne sont pas attirés par la nouveauté, surtout si, en fin de compte, il y a un risque d’insatisfaction. Pour la plupart des gens, le besoin de sécurité passe avant le besoin de découvrir de nouveaux endroits. Il est impossible de conquérir la masse sans prendre le temps nécessaire. Pour un restaurant, la conquête de la majorité demande habituellement de 2 à 3 ans.

Le politicologue Christian Dufour, professeur à l’École Nationale d’Administration publique écrit « On se replie sur ce qui a déjà fonctionné dans le passé, sur ce à quoi on est émotivement attaché et qui fonctionne encore pour l’instant ». « L’homme est un être d’habitude », notait Goethe.

Corde sensible numéro 23 — nous sommes des adeptes de l’hédonisme

L’hédonisme est une vieille philosophie grecque remise au goût du jour par les baby-boomers québécois (date de naissance des baby-boomers québécois entre 1947 et 1966). Cette doctrine, fait de la recherche du plaisir et du bonheur le but ultime de la vie. Mangeons, buvons, réjouissons-nous, l’avenir est incertain, n’attendons pas demain. Carpe diem selon le poème de Horace « cueille le jour présent et sois le moins confiant possible en l’avenir ».

Les médias pour satisfaire cette corde sensible multiplient les chroniques culinaires, les dégustations de vin, les rubriques modes, voyages et nouvel art de vivre. Le carpe diem occupe effectivement beaucoup de place dans notre vie.

Corde sensible numéro 24 — nous avons la joie de vivre

Nous sommes de ces peuples qui sont plus doués que d’autres pour le plaisir et la fête. Au Québec, nous aimons rire et nous amuser : nulle par au monde, le rire n’est mieux structuré qu’ici. Nous avons « juste pour rire », notre école nationale de l’humour, notre musée juste pour rire, notre festival juste pour rire et un nombre très impressionnant d’humoristes. Sondage après sondage, les Québécois se disent plus heureux que les autres Canadiens. Nous sommes devenus avec le temps les champions des festivals en tous genres. Les festivals sont tellement nombreux au Québec que les promoteurs n’arrivent plus à s’entendre sur les dates. En fait, tout ou presque... est devenu pour nous... un prétexte pour rire et faire la fête.


NOTRE RACINE LATINE

Les rythmes latins nous allument les sens comme ce n’est pas possible. Comme le disent certains Québécois, « c’est comme si on avait ça dans le coeur ».

De notre racine latine nous avons hérité de 6 cordes sensibles :

Corde sensible numéro 25 — nous aimons les enfants

Comme les Italiens, qui ont le taux de natalité le plus faible au monde, nous ne faisons plus d’enfant au Québec, toutefois nous aimons les enfants plus que jamais, ça nous habite tout simplement la tête.

Corde sensible numéro 26 — nous avons un très fort besoin de paraître

Comme les Italiens et les Italiennes, les Québécois et les Québécoises croient qu’il est très important de bien paraître. Selon Statistique Canada, chaque année, les Québécois et surtout les Québécoises, sont les Canadiens qui dépensent le plus pour leurs vêtements. Nous sommes fiers de cette différence avec le reste du Canada et nous la cultivons. Toujours selon Statistique Canada, les comptoirs de produits de beauté pour femmes, mais également pour hommes sont plus achalandés au Québec que partout dans le reste du Canada. Besoin de paraître oblige, il y a plus de salons de beauté pour femme par personne au Québec que dans le reste du Canada. Si nous dépensons autant d’énergie, pour être beau il faut bien sûr pouvoir le montrer quelque part. « C’est, soit on va restaurant, soit on invite à la maison… c’est toi qui décides chérie » (pour savoir qui décide voir notre corde sensible numéro 10 ».

Corde sensible numéro 27 — nous avons le talent artistique

Dans chaque Québécois, il y a un « créateur » qui dort. Dans son livre The rise of the creative class, Richard Florida, un Américain, écrit [traduction par Jacques Bouchard] : « La créativité de Montréal demeure un des secrets les mieux gardés de l’Amérique du Nord. Le secteur de la création compte pour plus de 30 % des forces vives et de l’emploi de la ville, et se répartit aussi bien dans les innovations technologiques que les créations artistiques. » Non seulement comme le disait Dostoïevski « l’art sauvera le monde », l’art contribue également à mettre le Québec sur la carte du monde. Au Québec, on peut dire que « l’art nous montre au monde ».

Corde sensible numéro 28 — nous sommes des grands sentimentaux

Apparemment, nous sommes souvent plus portés par nos sentiments que par notre réflexion. Selon les chercheurs qui se sont penchés sur notre cas, nous avons la larme facile. La preuve, en visionnant le film — Aurore, l’enfant martyre, les Québécois ont pleuré comme des bébés.

Jean d’Ormesson a écrit dans le Figaro : « S’il n’y avait pas de sentimentalité, il n’y aurait ni romans, ni tragédies, ni littérature, ni opéras. Il n’y aurait plus d’histoire, dans tous les sens du mot. Il n’y aurait presque plus rien du tout. Et l’on s’ennuierait à mourir. Autant que Dieu, l’intelligence, le devoir, ou le sacrifice, autant que la vertu, qui n’a de prix que parce qu’il est possible de s’en écarter, la sentimentalité donne un sens à la vie. »

Parce qu’il est déterminé par notre hyper sentimentalité, notre coeur de québécois est souvent porté par des raisons que notre raison ignore.

Corde sensible numéro 29 — nous faisons preuve d’instinctivité

Au Québec, nous misons très souvent sur le sentiment ou l’intuition, et non sur la raison. S’il n’avait été que de la raison, il n’y aurait pas de Cirque du Soleil. Comme le dit si bien Jacques Bouchard, nous sommes capables de former autour d’une personne ou d’une idée une série de croyances absolue que nous décrétons indiscutables, mais qui ne se fonde sur aucun élément de réalité ou d’objectivité. L’instinctivité dont nous faisons preuve s’apparente à l’inspiration des artistes.

Corde sensible numéro 30 — le chauvinisme

Cette corde très sensible fait de nous de très mauvais perdants. Comme le dit Jacques Bouchard, est chauvin celui qui manifeste une admiration exclusive pour son pays, un patriotisme parfois même belliqueux et agressif. L’autre définition qui complète bien le portrait est l’ethnocentrisme qui consiste à valoriser la manière de penser de son groupe social, de son pays, et à l’étendre abusivement à la compréhension des autres sociétés. Est-ce que le fait de penser que nous offrons une des meilleures restaurations au monde [sans en avoir véritablement la preuve] est du chauvinisme d’après vous ?


NOTRE RACINE FRANÇAISE

Les Québécois considèrent la France [malgré les défauts que nous lui reconnaissons], comme notre mère patrie. À cause de cette racine très profonde, nous avons développé l’amour du vin, de la bonne chère et de la culture populaire.

De notre racine française nous avons hérité de 6 cordes sensibles :

Corde sensible numéro 31 — le cartésianisme

Nous pensons donc nous avons raison. Nous sommes des « astineux », sans fin, obstinés par nos propres idées. Nous avons toujours raison et les autres ont toujours tort.

Corde sensible numéro 32 — l’individualisme

Comme Jacques Bouchard le dit si bien chaque Québécois nourrit son petit bout de gras. Apparemment, cette corde sensible nous vient de loin, Montcalm aurait même déclaré ce peuple « à un grand esprit d’indépendance, et il ne connaît ni règle ni règlement. » Hocquart, en 1736, écrivait : « ils sont naturellement des individus indociles […] ils sont de mauvais serviteurs. On doit à cette corde notre manie d’ériger des clôtures et des haies, tant à la campagne qu’en ville. Pour un grand nombre de Québécois, s’associer avec d’autres pour faire des affaires est la pire des choses à faire. Tout le monde ou presque connaît une histoire d’association qui n’a pas fonctionné.

Corde sensible numéro 33 — la sensualité

La corde française par excellence selon Jacques Bouchard. Bien manger et bien boire. Cette corde nous distingue clairement des autres canadiens. Pour exploiter cette corde c’est simple, il faut dire haut et fort, c’est bon… c’est même très bon. C’est bon à s’en lécher les doigts.

Nous devons à cette corde notre intérêt pour les fromages de fabrications artisanales, les bières de micro-brasserie. Tabler sur la corde 33 ça veut dire prendre les consommateurs par les sens. Émissions de télévision culinaires, livres de recettes avec de superbes photos. Si l’on mêle notre attirance pour la bonne chère avec notre attirance pour la belle chair (le sexe), ça donne les livres de recettes plaisir coupables : recettes cochonnes et gourmandes et manger sexy de Jean François Plante et sexy cuisiner pour deux de Louis François Marcotte.

Corde sensible numéro 34 – Nous sommes tous un peu vantards

Montcalm a écrit à propos de nous “Ils se croient, sur tous les points, la première nation du monde”. Selon Jacques Bouchard “les Québécois sont exceptionnels pour susciter ou tout au moins faire en sorte que le banal prît des allures plus intéressantes et plus attrayantes que la réalité.” Embellir un peu les choses ne fait de mal à personne, ça rend juste la vie plus intéressante.

Corde sensible numéro 35 – nous sommes aux prises avec la tergiversation

Si l’on croit les propos exprimés par Jacques Bouchard jamais nous n’avons autant tergiversé au
Québec au point d’en faire une tare nationale. Allons-nous [ou pas] privatiser la Société des alcools du Québec ? Allons nous [ou pas] faire ceci ou cela ? Nous sommes constamment en train d’hésiter. La plupart de nos décisions et agissements sont marqués par l’irrésolution, les détours, les faux-fuyants, le flottement.

Corde sensible numéro 36 — les “nationalismes”

Les Québécois sont tous nationalistes. Certains pratiquent un nationaliste doux, d’autres seraient prêts à tuer pour le fleurdelisé. Nous aimons tout simplement le mot et ce qu’il représente dans notre tête.


Pour en savoir plus sur les 6 racines vitales et les 36 cordes sensibles des Québécois je vous suggère de lire : Bouchard Jacques, Les nouvelles cordes sensibles des Québécois, Montréal, Les Éditions des Intouchables, 2006, 261 p.


MÉDIAGRAPHIE

Manuel de gestion-réflexion / Christian Latour


Pour communiquer avec Christian Latour 😎

• Sur Facebook : Christian Latour
• Sur Twitter : @Christian Latour
• Sur LinkedIn : Christian Latour, MBA


Notes

[1En 2006, l’auteur nous a livré une mise à jour de son œuvre, c.-à-d. une nouvelle lecture et interprétation de nos habitudes et comportements.

[2Selon Jacques Bouchard, le succès de la série télévisée Les Bougons, témoigne de notre admiration pour les experts de la finasserie !

f i i
© VRTKL.media (9405-7759 Québec inc.) 2012-2024 Tous droits réservés.
HRImag est un média francophone (site Web et magazine papier) qui offre de l'information de pointe sur l'industrie des HRI (hôtels, restaurants et institutions).