Comestibles forestiers : la filière se structure en Mauricie
En Mauricie, le champignon fait figure de star locale. La filière se développe depuis plusieurs années pour promouvoir les différentes variétés auprès du grand public mais aussi pour les restaurateurs et les institutions. Nous avons discuté avec Patrick Lupien, coordonnateur de la filière mycologique de la Mauricie, une OBNL qui veut redonner aux comestibles forestiers locaux leurs lettres de noblesse dans les assiettes.
HRImag : Comment la filière a commencé à émerger ?
Patrick Lupien : Dès 2009, le syndicat des producteurs de bois de la Mauricie (SPBM) a pris l’initiative de réaliser une étude sur les produits forestiers non ligneux dans la région. Un inventaire en forêt privé a permis de voir tout le potentiel. Des champignons jusqu’au épices forestières... Par la suite, une mission en Espagne, dans la région de Castilla y Léon, connue pour ses ressources mycologiques, a aussi été le départ pour des experts de la gastronomie du tourisme, de la transformation pour comprendre comment mettre sur pied une filière. On peut dire que c’est à partir de 2012 que la filière prend son envol. Et puis en 2017, le premier rendez-vous de la gastronomie forestière se tient avec pour résultat le développement de 18 ententes entre des entreprises de cueillettes (le plus souvent des travailleurs autonomes) et des chefs. Un beau défi commence.
Justement, quels sont les principaux défis ?
C’est toute la mécanique qui va permettre de créer des partenariats entre des cueilleurs « professionnels » et les restaurateurs ou services alimentaires. De plus en plus de comestibles forestiers s’invitent aux tables mais ce qu’il faut c’est un approvisionnement constant et durable avec des fournisseurs de confiance. Nous essayons donc de faciliter cette rencontre et de créer des outils pour aider à ce que l’entente puisse avoir lieu. Un guide complet avec les réglementations en vigueur a été développé, pour les restaurateurs mais aussi pour le secteur alimentaire en général. Pour les cueilleurs, une formation est proposée, reconnue par le gouvernement, pour les valoriser. Cela permet aussi d’influencer les chefs, mai aussi aux gestionnaires de marchés publics, à ne pas acheter chez un particulier et professionnalise le secteur. En Mauricie, on compte une dizaine de cueilleurs professionnels dont des travailleurs autonomes et des sociétés en nom collective. Le plus difficile est d’essayer de les faire travailler ensemble pour qu’ils puissent investir, obtenir des prix planchers, etc.
La filière et le marché prennent de l’ampleur...
On voit de plus en plus de produits de deuxième voir de troisième transformation disponibles avec les comestibles forestiers. Le volume s’en vient, les champignons de culture se développent aussi et des entreprises vont grossir avec le marché du déshydraté. Pour l’institutionnel, il faut accompagner le mouvement et inciter à intégrer des champignons ou d’autres comestibles forestiers aux menus. Rempli de vitamine D, le produit peut séduire les hôpitaux ou même les RPA pour leurs menus. Du côté des restaurants gastronomiques, l’important est de développer sa signature. Structurer l’approvisionnement permet de créer la confiance pour le consommateur mais aussi responsabiliser toute la chaîne d’approvisionnement.
Le prix est un paramètre important pour s’approvisionner, les comestibles forestiers n’en font pas exception..
On peut tout à fait avoir des prix raisonnables. Les champignons ne sont pas tous au même prix selon leur stade de développement. Par exemple, les boutons de bolets très convoités pour la gastronomie ne seront pas utilisé en restauration collective et des champignons cassés ou vieillis peuvent être utilisés dans une soupe. Le grade développement joue sur le prix. Pareil pour pleins d’autres espèces. En ce moment, c’est la saison de l’abondance.
La 8e édition MYCO rendez-vous de la gastronomie forestière, événement gastronomique de l’année nommé aux Lauriers de la gastronomie, se tiendra du 4 au 14 octobre.