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Changer son entreprise pour s’adapter à la nouvelle réalité

 
20 avril 2020 | Par François Pageau

L’évolution des industries de la restauration, de l’hôtellerie et du tourisme sera, de toute évidence, profondément influencée par la crise actuelle. Le retour à la normale est peu probable à court terme, voire même à long terme. « Le coup de frein pourrait durer jusqu’à la fin de 2021 », affirmait le ministre des finances du Québec Éric Girard dans La Presse du 16 avril 2020. Les différentes mesures d’aide offertes par les gouvernements et les institutions financières sont temporaires et insuffisantes pour réparer les torts provoqués par la perte de revenus sur une aussi longue période de temps. Il est et sera donc nécessaire de trouver de nouvelles formes d’organisations, de services et de produits pour répondre à la nouvelle réalité.

Nous proposons ici cinq postures stratégiques qui visent à traverser la crise et à évoluer vers une forme d’entreprise viable, dans un contexte d’une éventuelle reprise des activités, mais différente du passé. L’enjeu est majeur puisqu’il s’agit de survivre tout en répondant aux besoins du marché. Heureusement, les Québécois auront besoin de manger et de se faire plaisir.

Les mesures de distanciation sociale seront en vigueur pour plusieurs mois encore et certaines clientèles resteront confinées pour longtemps, selon les prévisions de plusieurs. Cela complique évidemment le service de nourriture et de boissons, les transactions commerciales et les échanges entre personnes à proximité les unes des autres.

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Ainsi, il est possible d’adopter différentes approches selon son portefeuille d’activités déjà offertes et les ressources financières, physiques et humaines disponibles. Ces postures pourraient même devenir permanentes dans le futur et amener ainsi les entreprises à évoluer, par la force des choses, vers de nouveaux modèles d’affaires. Plusieurs devront faire un deuil et accepter de voir leur entreprise muter vers une nouvelle forme, ou même fermer définitivement.

1ère posture : FONCER

Plusieurs établissements ont rapidement emboité le pas et offrent des services de livraison et de commandes à emporter. C’est une manière de promouvoir les activités qui existaient déjà, de générer des revenus et de faire face efficacement aux frais fixes. Ces entreprises ont fait preuve de flair, d’audace et réussissent dans certains cas à générer des revenus importants. On constate même des entreprises débordées par les commandes et qui réembauchent des employés. Le potentiel de marché est très important et mérite de s’y attarder.

2e posture : DIVERSIFIER

Il s’agit ici de changer son modèle d’affaire en abandonnant les activités habituelles, qui ne sont plus possibles, et s’orienter vers de nouvelles activités commerciales, qui peuvent répondre à la nouvelle demande et aux contraintes de distanciation. La salle à manger est fermée, mais les cuisines sont ouvertes, les chambres sont disponibles et les sites naturels sont encore accessibles. Comment divertir, servir, héberger ou accueillir les clients autrement ?

3e posture : PRIVILÉGIER LA COMMUNAUTÉ

Plusieurs entreprises ont orienté leurs activités en les plaçant au service de leur communauté. Les exemples sont nombreux. On ne compte plus les entreprises autrefois motivées par le gain financier qui, maintenant, offrent leurs installations et leurs ressources à soulager les personnes affligées par la crise. Ces formes d’aides sont diverses : cuisines communautaires, chambres pour personnes âgées, production de repas pour les sans-abris, etc. N’en nommer que quelques-uns serait injuste pour les autres ; heureusement, plusieurs de ces entreprises généreuses font les manchettes dans les médias. Ce n’est plus la survie qui motive l’entreprise mais plutôt le besoin de contribuer à soulager les plus démunis. C’est « l’âme sociale » qui représente l’essence de l’entreprise et lui permet de réaliser sa mission. On imagine très facilement que la reconnaissance sera appréciée et reconnue et que cette reconnaissance insufflera un élan de solidarité des citoyens, touchés par leur engagement.

4e posture : HIBERNER

Dans l’espoir que la crise ne dure que quelques semaines, en l’absence totale de revenus, certaines entreprises chercheront à réduire leurs dépenses au minimum, à recevoir les différentes aides financières offertes par les gouvernements fédéral et provincial, à négocier des congés de loyer ou d’hypothèque et à vendre ou liquider les actifs tangibles, comme les stocks de nourriture et de boissons. Le principe moteur de cette posture prudente est de réduire les besoins de liquidités autant que possible et le plus longtemps possible. Chaque ligne du budget sera ainsi analysée de près, afin de réduire les sorties de fonds. Évidemment, on comptera sur une reprise rapide des ventes.

5e posture : FERMER

Si les perspectives à courts termes sont pessimistes, si le marché donne des signes de faiblesse en raison de la baisse des revenus des consommateurs, si les ressources matérielles et technologiques de l’entreprise sont inadéquates pour lancer de nouveaux services, si les liquidités sont insuffisantes pour compenser les prochains mois, il est peut-être sage de simplement fermer l’entreprise. Les circonstances que nous vivons sont extraordinaires et imprévisibles. Il n’est pas honteux ni un signe d’échec de fermer une entreprise qui ne traverserait pas cette crise de toute façon. L’entêtement serait encore plus néfaste : pour certains, il vaut mieux mettre la clé sous la porte et minimiser les pertes immédiatement. Dans ce cas, il est prudent de consulter un syndic et son institution financière le plus tôt possible pour s’assurer de fermer dans les meilleures conditions et dans le respect des lois. Une fermeture ou une faillite, ça se prépare et se gère sérieusement. Malheureusement, il faudra admettre que plusieurs entreprises de restauration, hôtelière et touristiques emprunteront cette voie. Restaurant Canada annonçait que 10% des restaurants canadiens avaient déjà fermé leurs portes.

L’environnement actuel dans lequel évoluent les entreprises de restauration, hôtelières et touristiques est difficile et incertain. Tout un chacun s’entend pour concevoir que le retour à la normal se fera lentement et que nos industries s’en trouveront transformées. Les entreprises vivent dans cet environnement houleux et leur transformation est nécessaire à leur survie.

N’oublions pas que ces transformations s’inscrivent dans un contexte encore plus large et que d’autres enjeux existaient avant la crise de la COVID-19. Les mutations des entreprises de restauration, hôtelières et touristiques étaient déjà en marche afin de répondre aux pressions exercées par la crise écologique, la pénurie de main-d’œuvre due à la démographie déclinante, les innovations technologiques, l’altermondialisation, les iniquités de la richesse mondiale, le vieillissement de la population, etc. La crise de la CONVID-19 a peut-être pris le dessus sur ces enjeux, mais ceux-ci n’ont pas disparu pour autant. Les nouvelles formes de produits et services devront aussi tenir compte de ces enjeux afin de se tailler une part de marché et assurer leur viabilité.

Par François Pageau M.Sc. professeur de gestion
Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec

Mots-clés: Québec (province)
Restauration

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