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Exposition sur l’œuvre de Luc Laporte au 1700 La Poste

 
22 octobre 2014 | Par Guillaume Lussan

Pour sa deuxième année d’existence, l’espace d’exposition le 1700 La Poste présente Luc Laporte architecte. Réalisations et inédits, une exposition hommage à l’architecte qui a laissé son empreinte dans le patrimoine culinaire montréalais.

L’architecte Luc Laporte (1942-2012) est né à Montréal et y a œuvré toute sa vie. Il laisse en héritage des projets qui ont marqué l’urbanité montréalaise. Connu pour avoir construit quelques-uns des intérieurs de restaurants les plus appréciés, notamment avec L’Express, le Leméac, le Valois, le Holder, Laloux, le Café du Nouveau Monde (TNM), le Via Roma, le Restaurant de l’Institut (ITHQ), la Trattoria dei Baffone, aujourd’hui démolie et le défunt Sam. Il a également conçu quelques lieux de représentation tels le Musée Juste pour Rire et son Cabaret ainsi que le Club Soda tel qu’on le connaît aujourd’hui. Il est à l’origine de la rénovation et de l’agrandissement de la Société des Arts Technologiques (SAT). On lui doit quelques lieux représentatifs de Montréal tels que le pavillon du bassin Bonsecours et le regretté Lux, café-bar-restaurant-dépanneur emblématique des années 1980. Son dernier projet fut la restauration de l’actuel 1700 La Poste.

L’exposition sur les restaurants est complétée de divers projets réalisés ou inédits de l’architecte. Les salles de spectacle, les places publiques ou encore la chapelle de l’Abbaye Saint-Benoit du Lac rappellent au visiteur à quel point l’architecte rêvait de grandes structures tout en étant également urbaniste dans l’âme.

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Laurent-Michel Vacher, dans l’ouvrage « Bars, cafés, restos, scènes de la vie urbaine : entretiens avec les frères Holder » (Éditions Liber, Montréal, 2005, 112 p.), a recueilli des propos échangés avec l’architecte.

Comment en êtes-vous venu à concevoir des restaurants ?

En un sens, c’est un à-côté pour moi, je n’ai pas du tout une spécialité là-dedans je n’ai rien à voir avec les restaurants. J’ai toujours voulu faire des théâtres, des stades, des villes. Je suis davantage un homme de grandes structures, un charpentier dans l’âme et aussi un urbaniste. Je suis attiré par les villes et le centre des villes, voilà, et je suis convaincu que la civilisation est indissociable des villes.

C’est là que les restaurants interviennent. J’aime la vie nocturne, j’aime le vin rouge, j’aime bien manger. Nous sommes la première génération au Québec qui ait pu boire du vin sans complexes ! Eh bien, à vingt-six ans, en 1970, j’étais allé en Europe pour la première fois et j’avais été fasciné par ces lieux publics, que ce soient les brasseries parisiennes, les cafés viennois, les trattorias italiennes, des lieux de civilité, ouverts à tous, situés au niveau du trottoir.

De retour à Montréal, pas tellement comme architecte, mais comme personne, j’aurais aimé retrouver la même chose, qui ne soit pas comme les pubs anglais ni comme nos tavernes. Bon, il y avait alors à Montréal trois ou quatre restaurants « français » pour la bourgeoisie aisée, mais c’était autre chose, des endroits plutôt secrets et fermés, alors que je songeais à des lieux ouverts sur la rue.

Le premier projet de restaurant auquel j’ai travaillé, ce fut la Trattoria dai Baffoni, boulevard Saint-Laurent, vers 1973-1974. Il est peut-être bourré d’erreurs, mais toutes mes préoccupations y transparaissaient : il est de plain-pied avec la rue, il ressemble à un hall de gare, pas de tapis, rien de guindé, un plafond très haut.

Avec des amis, j’ai fait aussi le Grand Café, rue Saint-Denis, entre le boulevard de Maisonneuve et la rue Ontario. C’étaient des entreprises ingrates, qui me rapportaient peu, parce qu’il peut arriver que certains propriétaires de restaurants ne veuillent pas dépenser et n’aient pas beaucoup de goût.

Et puis j’ai fait l’Express en 1980, toujours au niveau de la rue, sans essayer de copier un restaurant parisien, parce que le résultat sonnerait toujours faux, mais en cherchant au contraire à créer quelque chose qui soit vraiment montréalais.

L’Express a été fait pour trois fois rien, dans un vieux triplex montréalais typique, un bouge infect, mais avec beaucoup d’amour et de doigté, pour des propriétaires cultivés et qui avaient du goût, et je peux vous dire que c’est une réussite dont je suis heureux : le décor de l’Express, c’est moi. J’ai cette forme de « goût français », au sens classique de l’expression – simplicité, économie de moyens, régularité, etc. (en disant ça, je songe aussi au Leméac, entre autres, même si je n’aime guère Outremont).

Mais vous savez, à part l’Express, entre vous et moi, je ne suis pas aussi fier de mes restaurants qu’on pourrait l’imaginer…

Mais c’est ainsi qu’un jour vous avez fini par travailler avec les frères Holder ?

Oui, mais beaucoup plus tard. Le Café du Nouveau Monde ne remonte qu’à 1997. C’était un défi où je devais composer avec plusieurs facteurs aberrants qui ne dépendaient pas de moi (n’ayant rien eu à voir avec la rénovation du théâtre, malheureusement).

Le Café du Nouveau Monde, on était obligé de le faire entrer sur une mezzanine étroite, dans un hall pas très intéressant où il fallait un comptoir pour desservir le théâtre aux entractes, avec cet escalier un peu trop gros et en plaçant une cuisine au sous-sol ! Alors j’ai fait mon possible et j’ai mis des rêves sur l’espèce de rideau qui court en haut des murs. Quant au Holder, j’ai voulu faire quelque chose qui ne soit pas une copie de la brasserie parisienne – parce qu’on ne peut pas copier, on est déjà assez provinciaux comme ça -, mais bien un lieu montréalais qui en serait un équivalent ou une déclinaison avec des allusions à un restaurant d’Europe centrale, etc.

Les frères Holder, ce sont des faiseurs, des réalisateurs de projets, parfois au mépris de leur propre équilibre financier d’ailleurs. Et je suis sûr qu’ils mijotent d’autres plans. Donc, je vais continuer à travailler à des projets de ce genre, probablement, lorsque l’occasion se présentera. Car vous savez, les bistrots, les bars, les cafés, les restaurants, c’est tellement important. Ce n’est pas un luxe, contrairement à ce qu’on peut croire. Ce sont des espaces de civilité et de civilisation, on s’y sent bien même si notre complet est un peu élimé, ce sont des endroits qui rendent les gens plus dignes et plus conviviaux et qui les aident à exister. C’est un peu de la douceur de vivre…. »

Luc Laporte, architecte. Réalisations et inédits.

  • Du 17 octobre au 20 décembre 2014.
  • Entrée libre du mercredi au samedi de 11h à 17h.
  • Adresse : 1 700, rue Notre-Dame Ouest, Montréal, Québec H3J 1M3
  • Web : 1700laposte.com

Sur la photo, une des nombreuses réalisations de M. Laporte.

La salle à manger du restaurant l’Express.

Photos : courtoisie

Mots-clés: 06 Montréal
Design et décoration
Événement
Restauration

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