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Personnalité HRI

Olivier Pellerin Lemay

Par Marie-Carole Daigle

 
4 mai 2014

À 22 ANS, IL COMPTE DÉJÀ 7 ANNÉES D’EXPÉRIENCE DIVERSIFIÉE EN RESTAURATION. ISSU DE LA PREMIÈRE COHORTE DU PROGRAMME GESTION D’UN ÉTABLISSEMENT DE RESTAURATION DU COLLÈGE LAFLÈCHE, OLIVIER PELLERIN LEMAY SERA OFFICIELLEMENT SUR LE MARCHÉ DU TRAVAIL DANS QUELQUES SEMAINES. IL AURA VRAISEMBLABLEMENT L’EMBARRAS DU CHOIX QUANT À SES PISTES D’AVENIR.

Olivier Pellerin Lemay roule sa bosse en restauration depuis qu’il a 15 ans. À 20 ans, il était affecté à la salle à manger de la résidence secondaire huppée d’un milliardaire britannique, près de Saint-Tropez (sud de la France). Pourtant, au début de son adolescence, il ne savait vraiment pas ce qu’il allait devenir. Architecte ? Pilote d’hélicoptère ? « Un jour, je me suis ouvert les yeux, se rappelle-t-il : c’est seulement en restauration, un milieu où je travaillais déjà, que je me voyais prêt à mettre autant d’efforts. C’est comme si l’on m’avait dit : "Fonce !" Je tenais cependant à faire de véritables études dans le domaine. Quand j’ai vu le programme du collège Laflèche, ça m’a fait "wow !" J’avais vraiment envie de me consacrer à la planification ou la direction en restauration. »

Durant sa dernière année de formation, Olivier a choisi de faire un stage de 150 heures à l’École nationale de police. « Comme il s’agit d’un des seuls services alimentaires en milieu scolaire à être géré à l’interne, c’est forcément différent, car tout est organisé ici même. Nous sommes notre propre siège social ! » Ce stage lui permet de toucher à tous les aspects de l’administration. « Pour gérer, il faut connaître le travail de tous les employés, souligne-t-il. On doit tout autant savoir standardiser une recette que laver la vaisselle – je le fais encore, d’ailleurs ! L’important, c’est de rester terre à terre, ne pas tomber dans le piège du col blanc déconnecté. Je sais aussi que j’ai encore beaucoup à apprendre de mes aînés. »

« La flamme, on l’a ou on ne l’a pas », laisse tomber le futur diplômé. Il l’a indubitablement, si l’on en croit son enseignant, Luc Gélinas : « Olivier est le genre de personne qui va dire : "Envoyez-moi le travail, et je vais m’organiser !" Depuis plus de cinq ans, il travaille à temps plein aux divers restaurants Maman Fournier tout en faisant des études également à temps plein, et rien n’y paraît. Ceux qui connaissent le moindrement la restauration savent que ce n’est pourtant pas du 32 heures/semaine bien relax, fait-il remarquer. Mais ce jeune vit au rythme de la restauration depuis des années. C’est aussi un gars qui a vieilli vite, pas le genre à se laisser abattre, ajoute l’enseignant, avec une pointe d’admiration dans la voix. Il a une superbe éthique de travail et remet toujours ses travaux à temps malgré ses multiples obligations. En fait, il démontre une telle fiabilité qu’on lui confie déjà des grandes responsabilités. »

Modeste, Olivier reconnaît qu’il est peut-être une exception pour sa génération : « Je ne m’attends pas à recevoir tout cuit dans la bouche ; je pense qu’on est récompensé après l’effort. » Et s’il avait une baguette magique, qu’est-ce que ce jeune avec autant de cœur au ventre changerait en prévision de la carrière qui l’attend ? Sans contredit la précarité du marché de la restauration : « Nous utilisons des produits périssables, la marge bénéficiaire est mince… C’est toujours un peu risqué… Quoi qu’il en soit, je ne veux pas tout bouleverser, précise-t-il avec sagesse, mais plutôt contribuer à la progression de mon domaine. » Parions là-dessus.

Photo : © Jean-Yves Duchesne

 
 
Profession

Devrait-on inclure le pourboire sur la facture au restaurant ?

 
4 mai 2014 | Par Sophie Suraniti

Au moment de régler l’addition, la question plane, se fait récurrente ou agite les esprits en d’interminables débats ! Serait-ce plus facile pour tous (service et clientèle) si le pourboire était compris ? Quelles seraient alors les conséquences d’une telle mesure ?

AVIS DE L’AVOCATE SPÉCIALISÉE EN LITIGE FISCAL

Pour Marie-Hélène Tremblay, avocate chez Spiegel Sohmer, le système québécois repose sur la confiance faite aux contribuables. Tout pourboire reçu directement ou indirectement doit être déclaré. Si les transactions s’effectuaient uniquement par cartes de débit ou de crédit, les choses seraient simples sur le plan fiscal, autant en ce qui concerne les déclarations (le restaurateur connaîtrait exactement les pourboires perçus par ses employés), que les contrôles (il n’y aurait plus d’écarts entre les revenus déclarés et les revenus estimés en référence aux vérifications faites par les instances gouvernementales¹). Ce sont les pourboires versés en argent comptant qui demeurent problématiques. Or, le mode de paiement des pourboires est inhérent au type d’établissement. Le client paiera souvent comptant dans un établissement sans flaflas ou à service rapide et règlera par carte dans un établissement plus huppé. Le pourboire fait partie intégrante de la relation client-serveur, du jeu satisfait/pas satisfait. Certes, l’inclure dans la facture arrangerait et simplifierait la fiscalité, mais qu’adviendrait-il de la prestation elle-même ?

AVIS DE L’ARQ

Pour François Meunier, vice-président aux affaires publiques et gouvernementales de l’Association des restaurateurs du Québec (ARQ), le passage au pourboire obligatoire serait perçu par les clients comme une taxe supplémentaire, une augmentation des prix. Cela n’aiderait en rien l’industrie qui requiert plutôt des mesures efficaces d’aide et de soutien à la consommation. Par contre, l’Association bataille depuis longtemps pour la mise en place de mesures permettant de corriger l’écart salarial entre le personnel en salle et celui en cuisine, exclu du système de pourboire actuel, car rares sont les établissements ayant établi une convention de partage équitable. Une voie intéressante et envisageable ? Celle des frais d’administration inclus comme ce qui se fait dans le milieu hôtelier avec les services de banquet ou dans certains endroits aux États-Unis ou dans les provinces canadiennes. D’autres modèles existent sans nul doute incluant des frais dits « cachés », mais il faudrait trouver un précurseur désireux de se lancer dans une approche inédite.

AVIS DE LA SPÉCIALISTE EN SERVICE À LA CLIENTÈLE

Pour Julie Tremblay, présidente de ENIPSO, entreprise d’évaluation de service à la clientèle, la pratique des services de banquet en hôtellerie incluant le pourboire sur le montant de la vente ferme génère d’une part des frustrations du côté du client qui se sent alors obligé de payer et, d’autre part, une certaine robotisation du service. Le service « s’automatise », devient moins chaleureux, moins humain – le pourboire étant compris dans la facture, à quoi bon faire plus ou mieux ? Cette problématique, Mme Tremblay la rencontre souvent sur le terrain. Avec son équipe, elle intervient sur ce lien ténu du savoir plaire qui peut vite disparaître en raison de la routine et des habitudes de service qui s’instaurent, surtout pour les serveurs expérimentés, mais aussi dans les cas où le service mise avant tout sur l’efficacité et la rapidité (comme pour un service traiteur). Dans le système actuel, le client perçoit le pourboire comme un remerciement. Il a la liberté de donner ce qu’il veut selon son degré de satisfaction. Le pourboire vient couronner en quelque sorte cette expérience (de plaisir) vécue grâce au service personnalisé.

L’AVIS DE RESTAURATEURS

Dans le cas de France Fournier, copropriétaire du restaurant Les Caprices de Fanny, la problématique du pourboire passe obligatoirement par un contrat écrit, en raison de son statut de propriétaire-employeur travaillant elle-même en salle et comme responsable de la gestion des dits pourboires (à titre de technicienne fiscaliste comptable). Cette entente écrite, certains candidats l’ont refusée. Pourtant, explique Mme Fournier, déclarer la totalité des pourboires offre beaucoup d’avantages à long terme : sur l’assurance-emploi, les 4 % pour les vacances qui dépendent des montants déclarés, etc. Selon elle, la problématique du système de pourboire actuel corrèle plus avec le manque de travailleurs qualifiés et l’afflux de saisonniers. Ces derniers conçoivent le service comme un emploi de dépannage et se satisfont du salaire avec pourboire, contrairement au personnel qualifié présent sur le plancher à longueur d’année. Un vrai pourboire commence au-delà des 8 %, voire 10 % (NDLR : C’est approximativement la différence pour atteindre le salaire sans pourboire). Sans doute y aurait-il satisfaction de part et d’autre si les 8 % étaient rendus obligatoires. Quant à augmenter le salaire des travailleurs qualifiés tout en laissant le soin au client de garder l’appréciation finale… peut-être cela serait-il souhaitable ?

Pierre Moreau, directeur général du Groupe Restos Plaisirs, n’est pas du même avis en ce qui concerne la compétence des gens sur le plancher. Ses différents établissements emploient fréquemment de jeunes saisonniers qui réalisent pour leur part de très belles prestations. Un bon serveur, apprécié à la fois de son employeur et de ses clients, sera alors gagnant des deux côtés. Quant au client, le système de pourboire actuel lui permet d’évaluer son assiette, de choisir, sans être contraint. Les clients sont souvent plus généreux avec des menus moins chers comme le petit déjeuner. Ils ajustent le montant selon le moment de la prise de repas (service plus rapide exigé à l’heure du lunch, par exemple) et le type d’établissement. C’est pourquoi M. Moreau juge la formule actuelle de gestion du pourboire satisfaisante (NDLR : La perception des taxes étant une autre paire de manches !), culturellement très ancrée au Québec et donc difficile à changer. Et puis, que donnerait une mesure à l’européenne, loin de donner satisfaction et qui tendrait plutôt actuellement à revoir sa copie, du moins à assouplir le système ?


  • ¹ Lire à ce propos Restaurants : utilisation de méthodes estimatives par Revenu Québec dans la nouvelle chronique judiciaire tenue par Mme Tremblay, en page 62.
 
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